Articles de jurisactuubs

  • L’absence de plafonnement de l’indemnité d’éviction du bail commercial interroge

    Arrêt publié le 27 janvier 2021

    Dans un arrêt en date du 10 décembre 2020[1], la troisième chambre civile de la Cour de cassation renvoie au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité relative à l’atteinte engendrée par l’indemnité d’éviction au droit de propriété du bailleur.

     

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  • La réforme du gage des stocks

    Article publié le 24 février 2016

     

    La réforme du droit des sûretés en 2006 n’a pas eu le succès tant espéré concernant le gage des stocks. De telle sorte que le législateur a voulu y remédier par la loi du 6 août 2015 dite « loi Macron ». Cette dernière a permis au Gouvernement d’intervenir par voie d’ordonnance. L’ordonnance du 29 janvier 2016 (n° 2016-56) relative au gage des stocks entrera en vigueur le 1er avril 2016 et s'appliquera aux contrats conclus à partir de cette date. L’utilité du gage sur stocks est fortement remise en question car il n’est pas applicable en cas de clause de réserve de propriété.

    Le gage des stocks permet au créancier de poser une sûreté sur les stocks du débiteur, qu’il pourra faire jouer si ce dernier est défaillant. Il peut s’agir d’un gage de chose future voir même un gage de la chose d’autrui car le stock n’est pas forcément dans le magasin du débiteur.

    Voici les différents apports de l’ordonnance de 2016.

    Selon le nouvel article L 527-3 du Code de commerce, la convention de gage des stocks est possible sous trois conditions cumulatives :

    • le débiteur est une personne morale de droit privé ou une personne physique. Cette personne doit avoir obtenu un crédit pour l’exercice de son activité professionnelle ;
    • le créancier est un établissement de crédit ou une société de financement ;
    • le gage porte sur les stocks du débiteur. Il confère un droit de préférence sur les autres créanciers

    Le gage des stocks est possible avec ou sans dépossession. L’ordonnance de 2016 permet le gage avec dépossession ; certains y verront un contre-sens car le commerçant se voit ainsi privé des biens nécessaires à son activité ; d’autres y verront un outil nécessaire au débiteur qui pourra alors aliéner son stock sans pour autant mettre en péril son activité professionnelle. Ce type de gage permet de rassurer les créanciers car ils pourront faire jouer le mécanisme de la subrogation et ce de manière automatique.

    De plus, il sera possible de choisir la réglementation applicable au gage sur stocks. Les parties auront alors le choix entre :

    • Application de la réglementation spécifique du gage sur stocks où il existe toutefois  de nombreux renvois au droit commun. 
    • Application de la réglementation du droit commun du gage.

    Cette ordonnance vient supprimer, par l’article L. 527-8 du Code de commerce, la règle de la prohibition du pacte commissoire chère à la Cour de cassation (Cass., ass. plén., 7 déc. 2015, n° 14-18.435). Ainsi, la conclusion d’un pacte commissoire est dès à présent admise. Il faudra toutefois surveiller l’évolution de la jurisprudence.

    Le gage sur stocks revêt un caractère indivisible, néanmoins, cette disposition n’est pas impérative. Par conséquent les parties sont libres d’y déroger conventionnellement. Elles peuvent prévoir une étendue à proportion du paiement de la créance. Il s’agit alors d’une garantie à extinction progressive.

    Il sera possible pour le créancier de faire constater l’état des stocks engagés, mais cela à ses propres frais. De plus, les biens gagés ou aliénés seront compris dans l’assiette du gage, et ce de plein droit.

    Le débiteur sera tenu de l’obligation de conservation des stocks excepté pour les gages de stocks avec dépossession. Mais, il ne sera plus tenu d’une obligation de souscription à un contrat d’assurance contre les risques d’incendie et de destruction. On conseillera cependant aux parties d’y avoir recours.

     « Les clauses arrosages » permettent aux créanciers, en cas de diminution de la valeur des stocks gagés soit de rétablir la garantie soit d’obtenir le paiement de la créance. Les taux ci-dessous évoqués sont supplétifs de volonté :

    • En cas de diminution d’au moins 10% de la valeur du stock (telle que mentionnée dans l’acte constitutif) et suite à la mise en demeure du débiteur, le créancier peut exiger soit le rétablissement de la garantie soit le remboursement d’une partie des sommes prêtées en proportion de la diminution constatée.
    • En cas de diminution d’au moins 20 % de leur valeur, le créancier peut exiger, après mise en demeure du débiteur, le remboursement total de la créance considérée comme échue.

    Avec ces différents apports, il est possible que le gage des stocks soit plus utilisé que par le passé.

    Elynn GOULLIANNE

    Sources :

    Stéphane Piédelièvre « La réforme du gage des stocks », Gazette du Palais, 16 février 2016 n° 7, P. 11

    Xavier Delpech - Une ordonnance de clarification pour le gage des stocks - AJ Contrats d'affaires - Concurrence - Distribution 2016 p.60

  • Le contract management, définition et enjeux.

    Article publié le 21 mars 2016

     

    Le vendredi 25 mars 2016 se tiendra à l'Université de Bretagne Sud, une conférence sur les enjeux du contract managament dans la stratégie d'entreprise. L'occasion de se pencher un peu plus en détail sur une profession, encore peu connue en France : Contract manager.

    Son activité peut être perçue comme la fonction qui consiste à gérer de façon méthodique et efficace un contrat afin d'optimiser sa réussite. Dans cette optique il supervisera le cycle de vie d'un contrat, depuis sa phase d'initialisation jusqu'à son terme. La phase pré-contractuelle occupera également une place importante dans le processus puisque chaque étape comporte des risques. Il apparaît dès lors opportun d'intervenir en amont de la conclusion du contrat afin d'éviter un problème rédactionnel susceptible d'exposer les signataires à des complications, lors de son exécution.

    Au vu de la description primaire de ces fonctions, se pose une question : Pourquoi cette profession, semblable de prime abord à celle du juriste, s'avère nécessaire pour les entreprises ?

    Avant tout, il convient de préciser que le contract manager n'est pas nécessairement juriste. La moitié seulement d'entre eux est issue d'une formation juridique, l'autre moitié se compose d'ingénieurs, de chef de projet, de commerciaux, de consultants financiers, ... Le directeur juridique d'Alstom, Pierrick Le Goff exprime parfaitement la différence entre les deux métiers lorsqu'il explique dans un article des Echos, que le « juriste se concentre sur la stratégie juridique d'un projet dans sa globalité », alors que le contract manager vient en complément de cette stratégie, avec une implication beaucoup plus opérationnelle dans le seul but d'optimiser un contrat.

    Cette recherche de maximalisation est au cœur de l'enjeu de la profession du contract manager puisque comme certains auteurs le font remarquer, le contrat n'est plus seulement un outil de prévention et de gestion des risques, il est devenu un véritable instrument au service de l'amélioration de la performance d'entreprise. Ce changement de fonction appelle forcément une mutation de sa gérance et c'est précisément ici qu'intervient le contract manager.

    Ce dernier est un réel technicien du contrat, il va et voit au-delà du juridique, ce qui se ressent dans l'exécution de sa mission. En effet, en coopérant activement avec les acteurs susceptibles d’intervenir dans la vie du contrat (opérateurs, vendeurs, acheteurs,...), le contract manager maitrise les risques et gère les problèmes liés au contrat, développe une qualité relationnelle avec les différents cocontractants, ou encore, s'assure de la pérennité économique du contrat. Cette mission se révèle essentielle lorsqu'on s'aperçoit qu'en moyenne, 10% des contrats conclus sont perdus chaque année et que 60% des contrats fournisseurs sont renouvelés automatiquement sans même que cela ne soit remis en cause. C'est également dans cette optique de lutte contre la banalisation des relations contractuelles que l'on mesure toute l'importance de sa fonction tant il apparaît nécessaire d'assurer une fidélisation de ses partenaires.

    Enfin, s'il est aisément admis que le recours à un contract manager peut être envisagé lorsqu’il s'agit de contrats d'envergures, certains s'accordent à penser qu'ils devraient l'être également lorsque les enjeux sont moins importants, avec des moyens proportionnés. On observe en effet qu'à côté de ces gros contrats, existent une grande quantité de transactions moins importantes dont l'exécution pourrait être rendue plus efficace si l'on consacrait un peu plus de moyens à leurs suivis.

     

    Lucie PARIS

     

    Sources :

    - Fiche métier contract manager – Carrières juridiques.

    - LEVEAU Grégory « 5 mythes au sujet du contract management » Village de la justice, 12 juin 2014.

    - BOUQUET Vincent « Le contract manager, ennemi ou allié du juriste ? » Les Echos, 13 novembre 2014.

    - DELEAU Patrick « Les contract managers affirment leur position sur l'échiquier des entreprises » Journal du Net, 7 juillet 2015.

  • La rupture brutale des relations commerciales établies dans le contrat de gérance-mandat

    Article publié le 30 décembre 2019

     

    Le 02 octobre 2019[1], la Cour de cassation s’est prononcée pour la première fois sur la rupture brutale des relations commerciales établies concernant un contrat de gérance-mandat.

    Dans les faits, une société de conseil et une enseigne de distribution de produits ont conclu, pour l'exploitation d'un magasin appartenant à cette dernière, un contrat de gérance-mandat d'une durée d'un an avec tacite reconduction, prenant effet au 01 avril 2010. L’enseigne qui est le mandant, a informé le gérant-mandataire, par lettre du 14 janvier 2013, que le contrat ne serait pas renouvelé au-delà du 31 mars 2013. Ce dernier l'a donc assigné en paiement de dommages-intérêts, notamment pour rupture brutale de la relation commerciale établie en application de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce et, subsidiairement, sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, ainsi qu'en annulation de la clause de non-concurrence post-contractuelle et en réparation du préjudice correspondant.

     

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