La prescription biennale de l’article L. 218-2 du Code de la consommation ne bénéficie pas aux cautions personnes physiques d’une personne morale

Article publié le 12 novembre 2017

 

Dans un arrêt du 06 septembre 20171, la première chambre civile de la Cour de cassation est venue une nouvelle fois préciser le champ d’application de l’article L. 218-2 du Code de la consommation, ancien article L. 138-2 du même Code.

En l’espèce, la Société générale avait, en 2007, consenti un prêt à une SCI. La banque avait à cette occasion sollicité en guise de garantie le cautionnement solidaire de deux personnes physiques. La SCI ne remplissant pas son obligation contractuelle, la banque a prononcé la déchéance du terme au début de l’année 2011. Huit mois après, elle assignait les cautions en paiement du solde du prêt resté impayé. Les cautions étant en liquidation judiciaire, le mandataire liquidateur a lui aussi été assigné par la banque en intervention forcée.

Les cautions ont notamment tenté d’échapper à leurs obligations en invoquant la protection de l’article L. 218-2 du Code de la consommation. Pour rappel, cet article prévoit une exception à la prescription de droit commun au profit du consommateur. Ainsi, il dispose que « L'action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans ». Si cet article avait été applicable, toute poursuite de la banque contre les cautions aurait alors été impossible dans la mesure où l’assignation des cautions en paiement du solde du prêt était intervenue plus de 2 ans après la conclusion du contrat de prêt.

Cependant, la cour d’appel de Paris a fait le choix d’interpréter strictement l’article L. 218-2 du Code de commerce. Elle a considéré que, la banque ne fournissant de service qu’à la SCI et non aux cautions qui ne faisaient que garantir la dette de la SCI, celles-ci ne pouvaient pas prétendre à l’application de cet article.

La position des juges du fond a été confirmée par la Cour de cassation qui a retenu que « la banque avait bénéficié de la garantie personnelle des cautions, sans leur avoir fourni aucun service au sens de l’article L. 137-2, devenu L. 218-2 du Code de la consommation, la cour d’appel en a exactement déduit que la prescription biennale édictée par ce texte était inapplicable à l’action en paiement litigieuse ».

Cette limitation à une interprétation stricte du texte n’est pas surprenante dans la mesure où ce dernier porte atteinte aux droits des professionnels. Les professionnels retrouvent ainsi le bénéfice du délai de prescription de droit commun qui est de 5 ans pour agir contre les cautions.

Toutefois, il est possible de se demander si la solution des juges du fond et des juges du droit aurait été la même si le bénéficiaire du service financier avait été une personne physique et non pas une personne morale comme tel était le cas en l’espèce.

En effet, la cour d’appel a évoqué le fait que la prescription biennale ne pouvait profiter qu’au débiteur et que les cautions ne pouvaient en bénéficier qu’au titre des « exceptions qui appartiennent au débiteur et qui sont inhérentes à la dette ». Dans les faits, le débiteur était une SCI qui n’était donc pas un consommateur au sens de l’article préliminaire du Code de la consommation2. La SCI ne pouvait de ce fait pas prétendre à l’application de l’article L. 218-2 du Code de la consommation.

Cependant, si le débiteur était une personne physique ayant la qualité de consommateur, les cautions pourraient-elle bénéficier de l’exception de prescription biennale qui appartiendrait alors au débiteur ? Aucune réponse n’est pour l’heure certaine.

Ainsi, cet arrêt du 06 septembre 2017 permet simplement d’affirmer que les cautions personnes physiques d’un débiteur personne morale ne peuvent pas solliciter la protection de l’article L. 218-2 du Code de la consommation. Seule une nouvelle décision jurisprudentielle permettra d’éclaircir la situation de la caution d’un débiteur personne physique.

 

Amélie PERROTIN

 

Sources

 - Civ. 1ère,  6 sept. 2017, n° 16-15.331, Publié au bulletin.

 - Civ. 2e, 3 sept. 2015, no 14-18.287 P: JCP E 2015, no 1452

 - Article L. 218-2 du Code de la consommation

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