Conventions d’honoraires d’avocats vs/ le droit de la consommation : La CJUE se prononce sur les clauses abusives

  Article publié le 07 février 2023

 

Capture d e cran 2022 12 04 a 15 59 04a CJUE a eu l’occasion de se prononcer sur le taux horaire des honoraires d’avocats dans une décision rendue le 12 janvier 2023[1].

En l’espèce, un consommateur a conclu cinq contrats de services juridiques avec un avocat. Le contrat comportait une clause qui ne répondait pas à l'exigence de clarté et de compréhensibilité.

La juridiction lituanienne interroge la CJUE sur l’interprétation des dispositions du droit de l’Union[2] visant à protéger les consommateurs contre les clauses contractuelles abusives[3].

La Cour répond à la question posée en rappelant qu’un contrat de prestation de services juridiques conclu entre un avocat et un consommateur doit comporter une clause qui fixe le prix des services fournis selon le principe du tarif horaire.

Ensuite, la Cour apporte un éclairage d’une part sur l’exigence de rédaction claire et compréhensible d’une telle clause, et d’autre part, sur l’éventuel caractère abusif de celle-ci. Enfin, elle conclut sur le caractère abusif d’une clause relative au prix.

 

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1.Sur l’exigence de rédaction claire et compréhensible d’une clause d’un contrat de prestation de services juridiques

Sur ce point, l’exigence de rédaction claire et compréhensible d’une clause d’un contrat de prestation de services juridiques, impose que le contrat doit exposer de façon transparente le fonctionnement concret du mécanisme auquel se réfère la clause concernée, de sorte que le consommateur soit mis en mesure d’évaluer, sur le fondement de critères précis et intelligibles, les conséquences économiques qui en découlent pour lui.

Cependant, ces informations, qui peuvent varier, doivent comporter des indications permettant au consommateur d’apprécier le coût total approximatif de ces services.

En outre, il revient au juge national d’évaluer, en tenant compte de l’ensemble des éléments pertinents entourant la conclusion de ce contrat, si les informations communiquées par le professionnel avant la conclusion du contrat ont permis au consommateur de prendre sa décision avec prudence et en toute connaissance des conséquences financières qu’entraînait la conclusion dudit contrat.

Les juges européens constatent qu’une clause d’un contrat de prestation de services juridiques fixant le prix selon le principe du tarif horaire, en l’absence d’informations préalablement communiquées au consommateur lui permettant de prendre sa décision avec prudence et en toute connaissance des conséquences économiques qu’entraîne la conclusion de ce contrat, ne répond pas à l’exigence de rédaction claire et compréhensible au sens du droit de l’Union.


2.Sur l’éventuel caractère abusif d’une clause d’un contrat de prestation de services juridiques

Sur ce point, la Cour de justice relève qu’il incombe au juge national d’évaluer, eu égard à l’ensemble des circonstances de l’affaire :

  • le possible non-respect de l’exigence de bonne foi ;
  • l’existence d’un éventuel déséquilibre significatif au détriment du consommateur.

La Cour ajoute qu’il est loisible aux États membres d’assurer, un niveau de protection plus élevé́ aux consommateurs.

Concernant le cas en l’espèce, les juges européens précisent que la clause du contrat ne doit pas être réputée abusive du seul fait qu’elle ne répond pas aux exigences de transparence sauf si la réglementation nationale prévoit expressément que la qualification de clause abusive découle de ce seul fait.

 

3.Sur les conséquences du caractère abusif d’une clause relative au prix

La Cour de justice observe que le juge national est obligé d’écarter l’application d’une clause abusive, sauf si le consommateur s’y oppose.

Elle ajoute que, dans l’hypothèse où l’invalidation du contrat dans son ensemble exposerait le consommateur à des conséquences particulièrement préjudiciables, le juge national peut remédier à la nullité́ de ladite clause en lui substituant une disposition de droit national à caractère supplétif ou applicable en cas d’accord des parties.

Toutefois, le droit de l’Union s’oppose à ce que le juge national substitue à la clause abusive annulée une estimation judiciaire du niveau de la rémunération pour les services fournis.

Au niveau du droit français, la Cour de cassation[4] a également eu l’occasion de se prononcer sur les conventions d’honoraires d’avocats. En effet, la Haute juridiction a prononcé une sanction fondée sur le caractère abusif de clauses contenues dans une telle convention.

Jéssica P. Lima

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[1] CJUE 12 janv. 2023, aff. C-395/21

[2] Directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs (JO 1993, L 95, p. 29).

[3] Direction de la Communication [CJUE]. (2023, 12 janvier). Une clause d’un contrat de prestation de services juridiques conclu entre un avocat et un consommateur qui fixe le prix selon le principe du tarif horaire, sans comporter d’autres précisions, ne répond pas à l’exigence de clarté́ et de compréhensibilité́, [Communiqué de presse]. https://curia.europa.eu/jcms/upload/docs/application/pdf/2023-01/cp230010fr.pdf

[4] Cass. civ. 2e., 27 octobre 2022, n°21-10.739

 
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