La fin de la conciliation ne met pas fin à l’engagement de la caution (Cass. Com., 26 octobre 2022, n°21-12.085)
- Par jurisactuubs
- Le 22/01/2024
- Dans Droit des sûretés
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Article publié le 5 janvier 2023
ans un arrêt du 26 octobre 2022, la chambre commerciale de la Cour de cassation s’est prononcée sur le statut de la caution à l’issue de la conciliation[1].
En l’espèce, une société avait conclu avec ses principaux créanciers un accord de conciliation, en exécution duquel une banque lui avait consenti un prêt. Le gérant de la société s'était porté caution solidaire du prêt. L'année suivante, la société avait été mise en redressement judiciaire. La banque avait alors déclaré sa créance, prononcé la déchéance du terme et poursuivi le gérant en paiement.
Par jugement du 27 novembre 2017, le tribunal de commerce avait déclaré la demande de la banque fondée et condamné le gérant en paiement. Ce dernier a interjeté appel.
Le 15 décembre la chambre commerciale de la Cour d’appel de Rennes a infirmé le jugement du tribunal de commerce, en déclarant caduc le cautionnement du gérant en date du 4 mai 2012. En effet, les juges du fond ont relevé certes que, dans le cadre de l'accord de conciliation, la banque avait accordé une nouvelle ouverture de trésorerie et le remboursement du découvert existant, mais ils ont considéré que, du fait de l'échec du protocole de conciliation, la banque n'avait pas conservé le bénéfice de l'engagement de caution accordé par le gérant dans le cadre de l'accord. La banque a donc formé un pourvoi en cassation.
Ainsi, dans le cadre d’une conciliation, le créancier qui a consenti une avance générant une nouvelle créance, garantie par un cautionnement, peut-il demander l’exécution par la caution de son engagement, malgré le caractère caduc de l’accord qui les lie ?
Tout d’abord, la Haute juridiction a commencé par rappeler le principe. En effet, elle indique que lorsqu'il est mis fin de plein droit à un accord de conciliation conclu entre un débiteur et ses créanciers en raison de l'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire, le créancier, qui a consenti à celui-ci des délais ou des remises de dettes dans le cadre de l'accord de conciliation, recouvre l'intégralité de ses créances et des garanties[2].
Toutefois, il ne conserve pas le bénéfice des nouvelles garanties obtenues dans le cadre de l’accord en contrepartie de ces délais ou des remises de dettes.
En somme, le créancier, qui a consenti, pour les besoins de l'accord, une avance donnant naissance à une nouvelle créance, garantie par un cautionnement, est en mesure de demander l'exécution par la caution de cet engagement, en dépit de la caducité de l'accord.
Enfin, il ressort de cet arrêt que la Cour d’appel de Rennes viole l’article L. 611-12 du code de commerce, lorsque pour déclarer caduc le cautionnement d’un prêt, elle retient que le concours consenti par la banque à la société débitrice, a été accordé dans le cadre de l’accord de conciliation auquel le prononcé du redressement judiciaire a mis fin et en déduit que l’échec de l’accord a entraîné la caducité de celui-ci dans son intégralité, notamment celle des engagements de caution.
Cette décision peut surprendre de prime abord, car en 2019 les hauts magistrats se sont fondés sur l’article précité pour juger que la caducité d'un accord de conciliation en raison de l'ouverture d'une procédure collective s'étend à l'intégralité de l'accord et touche notamment le cautionnement consenti dans le cadre de l'accord en contrepartie d'une remise de dette[3].
Mais l’arrêt étudié apporte une précision essentielle. D’une part il faut distinguer le cas où une garantie est octroyée en contrepartie d'une remise ou d'un délai concernant une créance antérieure à l'accord de conciliation. C’est notamment l’hypothèse décrite dans l’arrêt du 25 septembre 2019.
D’autre part, il faut distinguer le cas où la créance née pour les besoins de l’accord et est grevé d’une sûreté personnelle.
À noter qu’elle peut tout à fait prendre la forme d’un apport en trésorerie. Dans cette hypothèse, le créancier conserve le bénéfice de la sûreté obtenue, même si une procédure collective fait échec à l’accord de conciliation.
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