La réforme des seuils sociaux

Article publié le 21 février 2019

 

Afin de favoriser la croissance des entreprises et supprimer les freins à l’embauche, l’article 6 du projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises, dit « projet de loi PACTE », a pour mission de réformer les règles relatives aux seuils sociaux.

L’objectif est triple pour cette réforme, elle viendra harmoniser le mode de calcul des effectifs, rationaliser les niveaux de seuils et prévoir de nouvelles modalités d’atténuation lors du franchissement des seuils. Les règles actuelles sont multiples et particulièrement complexes, elles posent donc de nombreuses difficultés. Ainsi, les PME sont notamment impactées dans leur croissance et sont parfois réticentes à engager du personnel afin ne pas dépasser les seuils sociaux.

En premier lieu, on constate l’éclatement des modalités de calcul des effectifs avec certaines spécificités prévues par le Code du travail[1] et d’autres par le Code de la sécurité sociale. L’idée est d’harmoniser ce mode de calcul des effectifs en se basant sur le dispositif prévu par l’article R130-1 du Code de la sécurité sociale considéré notamment comme le plus favorable pour l’entreprise. En ce sens, le projet de loi prévoit la comptabilisation de l’effectif salarié annuel de l’employeur en retenant « la moyenne du nombre de personnes employées au cours de chacun des mois de l’année civile précédente » et ce même si l’employeur est « une personne morale comportant plusieurs établissements ». Par ailleurs, le projet retient aussi que « l’effectif à prendre en compte pour l’année de création du premier emploi salarié titulaire d’un contrat de travail dans l’entreprise correspond à l’effectif présent le dernier jour du mois au cours duquel a été réalisée cette première embauche ». Toutefois, la dérogation retenue à l’article R130-1 III du Code de la sécurité sociale resterait applicable.

En second lieu, les niveaux de seuils d’effectifs existant sont multiples. Effectivement, on dénombre 199 obligations réparties sur 49 seuils d’effectifs. Le projet de loi PACTE entend simplifier le droit en modifiant voire supprimant certains seuils afin, in fine, de favoriser l’emploi et la croissance. Le projet de réforme prévoit ainsi de garder uniquement les seuils de 11, 50 et 250 salariés. Le seuil de 20 salariés serait supprimé au profit du seuil de 50 salariés. Ainsi, en dessous du seuil de 50 salariés, les entreprises concernées se verraient appliquer le taux réduit de contribution au FNAL[2], dispensées d’établir un règlement intérieur ou encore bénéficieraient de l’exonération de participation à l’effort de construction. Toutefois, l’obligation d’engager des travailleurs handicapés resterait fixé à 20 salariés.

En outre, la mise à disposition d’un local syndical commun concernerait dorénavant les entreprises avec un effectif supérieur à 250 salariés (contre 200 salariés actuellement).

Enfin, le seuil à partir duquel une entreprise doit s’enregistrer au répertoire des métiers passerait de 10 à 11 salariés.

Il est évident que l’harmonisation et la rationalisation des seuils sociaux s’accompagne aussi d’une révision des effets de seuils. Effectivement, l’article 6 1° II du projet de loi PACTE prévoit que « le franchissement à la hausse d’un seuil d’effectif salarié est pris en compte lorsque ce seuil a été atteint ou dépassé pendant cinq années civiles consécutives ». Dans le cas d’une diminution de l’effectif, le délai de 5 ans court à nouveau. Cette mesure permet aux entreprises d’avoir le temps d’appréhender leurs nouvelles obligations et s’y conformer. En conséquence de ce nouveau régime juridique, les mesures qui prévoyaient l’atténuation de l’effet de seuil seraient supprimées (forfait social, déduction forfaitaire de cotisations patronales sur les heures supplémentaires, la contribution FNAL et la contribution formation).

Cette réforme des seuils sociaux est sans aucun doute l’une des mesures phares du projet de loi PACTE. L’harmonisation du régime juridique des seuils sociaux est clairement la bienvenue. Toutefois, certaines réserves sont émises au sujet de cette réforme. En effet, pour certains, l’équilibre entre la compétitivité des entreprises et les garanties sociales serait rompue : la suppression ou la modification des seuils sociaux aurait un impact négatif sur les droits des salariés. D’autres, au contraire, estiment que la réforme ne va pas assez loin. En ce sens, le sénat a voté en première lecture le relèvement à 100 salariés du seuil fixé à 50 salariés. Toutefois, les députés auront le dernier mot sur cette question.

 

Brieuc BENJAMIN

 

 Sources:


[1] Articles L1111-2 et L1111-3 du Code du travail

[2] Fonds national d'aide au logement

PME Projet de loi PACTE seuils sociaux effectifs salariés

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