Pleine compétence de la commission arbitrale des journalistes pour fixer l’indemnité de rupture du contrat de travail (Cass.soc. 26 octobre 2022)
- Par jurisactuubs
- Le 22/01/2024
- Dans Droit du travail
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Article publié le 08 janvier 2023
ans une décision en date du 26 octobre 2022 [1] la chambre sociale de la Cour de cassation reconnaît pleine compétence à la commission arbitrale des journalistes pour fixer l’indemnité de rupture du contrat de travail à l’initiative de l’employeur et retenir des critères distincts de ceux de la juridiction prud’homale pour y parvenir[2
L’article L.7112-4 du Code du travail, permet à la commission arbitrale de déterminer l’indemnité de licenciement, lorsque l’employeur a exercé pendant 15 années au sein de la même structure. Il lui permet également de réduire ou même de supprimer l’indemnité fixée dans le cadre d’une faute grave ou de fautes répétées.
En l’espèce, un journaliste a été engagé le 1er octobre 1986 dans une société, et sera par la suite en charge du service photographie. Il est licencié pour faute grave le 16 janvier 2017. Il assigne la société employeur le 11 mai 2017 devant la juridiction prud’homale, contestant son licenciement et réclamant le versement d’indemnités. Le 10 avril 2018, le journaliste saisit la commission arbitrale des journalistes aux fins de faire fixer son indemnité de licenciement et condamner la société à la lui verser.
La société forme un recours en annulation de la décision retenue par la commission arbitrale, ayant fixé le montant de l’indemnité pour la totalité de son ancienneté de vingt-huit années dans l’entreprise au regard de l’article L.7112-4 du Code du travail. L’employeur, déclare que l’article susvisé « donne à la commission arbitrale compétence pour réduire ou même supprimer le montant de l'indemnité de licenciement « en cas de faute grave ou de fautes répétées » », mais qu’il ne donne pas à la commission « la compétence pour se prononcer sur la matérialité et la gravité des faits fautifs qui motivent le licenciement, sur la base de critères distincts de ceux pris en compte par le conseil de prud’hommes ». Cette commission outrepasserait alors ses pouvoirs au regard des dispositions prévues par le Code du travail. Dans une décision en date du 11 février 2021, la Cour d’appel de Paris a affirmé la pleine compétence de cette dernière pour fixer l’indemnité de rupture du contrat de travail à l’initiative de l’employeur et retenir des critères distinct de ceux de la juridiction prud’homale pour y parvenir. Elle aurait alors violé l’article susvisé.
Dès lors, la Cour de cassation va être amenée à s’interroger sur la pleine compétence de la commission arbitrale des journalistes pour fixer l’indemnité de rupture du contrat de travail (à l’initiative de l’employeur), indépendamment des critères retenus par la juridiction prud’homale.
La Haute juridiction donne raison à la Cour d’appel en rejetant le pourvoi de l’employeur, puisque la commission arbitrale des journalistes détient une compétence exclusive en ce qui concerne la fixation du montant de l’indemnité de licenciement due au journaliste ayant plus de quinze ans d’ancienneté. La Cour de cassation avait déclaré antérieurement que la commission arbitrale est « seule compétente pour statuer sur l’octroi et sur le montant d’une indemnité de licenciement, quelle qu’en soit la cause, au journaliste ayant plus de quinze ans d’ancienneté » [2]. Ses décisions ne peuvent donc pas être frappées d’appel [3].
La commission arbitrale est ainsi compétente pour réduire ou supprimer l’indemnité de licenciement due au journaliste notamment en cas de faute grave ou de faute répétées, au regard de l’article L.7112-4 du Code du travail. De ce fait, pour fixer le quantum ou supprimer cette indemnité, la Cour va réaffirmer[4], que la commission arbitrale doit « apprécier la gravité ou l'existence des fautes alléguées, sans que la décision de la juridiction prud’homale (…) ne s'impose à elle ». Elle dispose d’un véritable pouvoir d’appréciation des faits reprochés à la personne licenciée, indépendamment de ceux retenus par la juridiction prud’homale. C’est en ce sens que la Cour de cassation a reconnu dans cet arrêt que « La Cour d'appel, qui, а bon droit, n'a pas accueilli le recours en annulation dont elle était saisie, n'avait pas à statuer sur le fond ».
La décision retenue par la Cour de cassation s’inscrit ainsi dans une continuité jurisprudentielle, et condamne de cette façon la société aux dépens.
[1] Soc. 26 oct. 2022, n°21-14.816
[2] Maurel E., " Détermination de l’indemnité de licenciement par la commission arbitrale des journalistes ", Dalloz actualité (en ligne), 2022
[2] Soc. 24 sept. 2008, n° 07-40.264, Soc. 14 fevr. 2018, n° 16-25.649
[3] Soc. 29 oct. 2002, n° 00-13.413
[4] Soc. 29 oct. 2002, n° 00-13.413
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