Les effets du changement climatique sur le droit des entreprises

Article publié le 3 janvier 2016

 

 

Au lendemain de la COP21, les entreprises doivent s'interroger sur les effets du changement climatique.

En effet, il peut conduire à des bouleversements écologiques et économiques, en particulier pour les entreprises il existe un risque lié à leur implantation ou un risque de dépréciation de certains de leurs actifs.

Le droit est un outil décisif pour orienter les sociétés vers une adaptation à ces changements climatiques. Le législateur français tente d'oeuvrer en ce sens (I), et les entreprises doivent s'adapter à ces modifications (II) tant sur le plan national qu'international (III).

 

I- Une prise de conscience du législateur

Toutes les entreprises, sans considération de leur forme sociale, sont confrontées à ce changement climatique sans précédent qui exige de restituer à l'environnement sa place dans notre activité économique.

Certaines dispositions légales ont été mises en place.

Prenons comme premier exemple, la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement qui impose aux entreprises de plus de 500 salariés de réaliser un bilan de leurs émissions de gaz à effet de serre (GES) et de proposer des plans d'action pour limiter leurs émissions.

Depuis l'ordonnance n° 2015-1737 du 24 décembre 2015 relative aux bilans d'émission de gaz à effet de serre, ce bilan doit être réalisé tous les 4 ans (et non plus 3 ans).

Depuis le 1er janvier 2016 elles encourent 1500 euros d'amende en cas de non respect.

Dans le même sens, l'article R. 513-23 du C. mon. fin. a confié à l'Agence française de développement, la mission de « financer des opérations de développement, dans le respect de l'environnement » ; la Banque publique d'investissement créée en 2012 doit elle aussi tenir compte des enjeux environnementaux lorsqu'elle accorde des prêts.

Un dernier exemple particulièrement riche en la matière; la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, modifiant l'article L. 225-102-1 C.com qui prévoit désormais que le rapport annuel du Conseil d'administration ou du directoire des sociétés anonymes (SA) doit rendre compte des conséquences environnementales de leurs activités.

Par ailleurs, à compter du 31 décembre 2016 sera incluse l'obligation de rendre compte « des risques financiers liés aux effets du changement climatique et des mesures que prend l'entreprise pour les réduire en mettant en œuvre une stratégie bas-carbone dans toutes les composantes de son activité »

Il s'agit d'une avancée importante qui s'inscrit dans la continuité des lois Grenelle I et II, cette loi offre des outils ainsi que des objectifs pour contribuer au passage d'une économie verte.

Ces nouvelles législations liées au changement climatique vont impacter le comportement des entreprises.

 

II- La réponse des entreprises

En premier lieu, l'exemple précis des sociétés d'assurances montre le réel impact de ce changement climatique sur les entreprises.

Les sociétés d'assurances sont particulièrement touchées. En effet, les évènements naturels majeurs ont été multipliés par 5 en 50 ans, ce qui a eu pour conséquence un coût très important pour ces sociétés d'assurances.

Ce coût qui ne cesse de croître va en définitive se répercuter sur la prime d'assurance que va devoir verser le souscripteur. En contrepartie, ces entreprises doivent informer les souscripteurs de la prise en compte, dans leur politique d'investissement, des critères environnementaux.(art. L. 533-22-1 C. mon. fin.)

Cela montre clairement l'importance pour les entreprises d'adopter une stratégie pour prendre en compte le problème environnemental.

Plus généralement, désormais les entreprises vont devoir d'une part, sensibiliser leurs salariés et d'autre part, les former et les mobiliser pour répondre efficacement à ces enjeux récents.

De plus, outre les salariés, la mobilisation des distributeurs, des fournisseurs et des collaborateurs des entreprises est nécessaire, pour inculquer un véritable esprit d'entreprise sur ces changements climatiques et plus largement sur l'environnement.

C'est pourquoi, dès 1992, a été créée l'association française des entreprises pour l'environnement (EPE) dont le rôle est de mieux prendre en compte l'environnement dans les décisions stratégiques et la gestion courante des entreprises.

Les entreprises sont confrontées à une nouvelle donnée, qu'elles doivent prendre en compte au plus vite.

En pratique, cela doit se traduire par des engagements et des actes sincères de la part des dirigeants d'entreprises, par des dialogues avec le gouvernement ainsi qu'un suivi important afin d'améliorer les stratégies pour les entreprises futures, y compris à l'international.

 

III- Un problème international

Les changements climatiques ne connaissent pas les frontières. Des accords internationaux pour répondre à ces problématiques sont indispensables.

En effet, il faut fixer des objectifs clairs concernant les mesures environnementales pour toutes les entreprises qui sont dites internationales et qui ont un impact dans plusieurs pays afin d'harmoniser ces nouveaux droits, ces nouvelles obligations pour les sociétés, et ainsi répondre efficacement au problème très urgent qu'est le changement climatique

Ainsi, le 17 avril 2013, la commission européenne a publié une stratégie européenne d'adaptation par rapport aux changements climatiques (le coût de l'adaptation représente entre 0,1 à 0,5 % du PIB alors que l'inaction serait dix fois supérieure).

En ce sens, au Royaume-Uni, le « Reporting power » enjoint les entreprises de secteurs stratégiques à rendre compte de leur vulnérabilité au changement climatique et à proposer des dispositifs pour y remédier.

Enfin, l'ISO (organisation internationale de normalisation) a créé la famille norme ISO 14000 qui donne des outils pratiques aux entreprises qui souhaitent maîtriser leur responsabilité environnementale.

Pour conclure, les entreprises doivent relever ce défi et s'inscrire dans une nouvelle dynamique.

Malgré les coûts que cela peut engendrer, il s'agit véritablement d'un nouveau facteur de compétitivité.

 

Médéric GUEGUEN

Sources :

  • ONERC (observatoire national sur les effets du réchauffement climatique), rapp. au Premier ministre et au Parlement « l'adaptation de la France au changement climatique » mai 2012.
  • Rapport « Les entreprises et l'adaptation au climatique », EPE, ONERC, Avril 2014.
  • Rapport CDC-MEDDE, chiffres clés du climat en France et dans le monde, Edition 2014, Repères.
  • Recueil Dalloz, n°39, 12 nov. 2015, dossier : Quel droit face au changement climatique ?
  • Rédaction du Village de la Justice « Lutte contre le changement climatique : la stratégie du droit ».

 

 

Changement climatique COP21 Droit de l'environnement Droit des entreprises

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Commentaires

  • Legrand
    • 1. Legrand Le 07/01/2016
    Bonjour ,

    Dans le cadre des nouvelles normes environnementales j'aurais aimé connaître les sanctions auxquelles s'exposent les entreprises ne respectant pas les normes REACH visant à interdire les traitements de surfaces à base de chrome hexavalent (Cr6) ? Merci
    • jurisactuubs
      • jurisactuubsLe 07/01/2016
      Bonjour, Tout d'abord, comme vous l'indiquez, le règlement REACH donne des directives en matière de contrôle et de sanctions. L'ordonnance du 26 février 2009 et le décret n°2010-150 du 17 février 2010 ont introduit dans le Code de l'environnement, aux articles L. 521-1 et suivants, le régime des sanctions applicables en cas de non-application de ce règlement REACH. Il existe deux types de sanctions indépendantes l'une de l'autre : d'une part, les sanctions administratives et d'autre part, les sanctions pénales. Elles peuvent néanmoins être appliquées simultanément. De plus, la sanction peut également venir des acteurs économiques entre eux dans la mesure ou seules des substances, préparations ou articles conformes à la réglementation REACH peuvent être mises sur le marché. Dans un premier temps, en ce qui concerne les sanctions administratives : Les articles L.521-12 et suivants du Code de l'environnement prévoient tout d'abord une mise en demeure de se conformer à la réglementation. Dans le cas, ou l'on ne se conforme pas à celle ci : Il est prévu une amende de 15 000 euros ainsi qu'une astreinte journalière de 1500 euros. De plus, il y a l'interdiction d'importer, de fabriquer, d’utiliser ou de mettre sur le marché. Il existe enfin des consignations de sommes qui sont contraignantes. Dans un second temps, concernant les sanctions pénales : Elles sont prévues à l'article L.521-21 du code de l'environnement : Les peines vont de 20 000 euros d’amende et 3 mois d’emprisonnement à 75 000 euros d’amende et 2 ans d’emprisonnement. Par ailleurs, on trouve des peines complémentaires pour les personnes physiques : La fermeture temporaire ou définitive de l’installation en cause, la confiscation de la substance et enfin l'interdiction d'exercer l'activité. Merci pour votre question, Bien cordialement. JurisactUBS, en quête d'actualité juridique.
  • Legrand
    • 2. Legrand Le 08/01/2016
    Merci à vous pour votre réponse très complète et rapide , bonne continuation !

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