INTERVIEW : Précisions sur la loi de finances pour 2018

Article publié le 5 mars 2018

 

Chaque année, le Parlement approuve le budget de l’Etat en votant la loi de finances pour l’exercice suivant, afin de déterminer le montant, la nature et l’affectation des ressources et des charges de l’Etat.

Maître COTILLON, avocat au barreau de Rennes, a accepté de répondre à nos questions concernant la loi de finances pour 2018.

 

Quelles sont les nouveautés principales cette année ?

Maître COTILLON : Toutes les lois de finances ne se ressemblent pas. Ces dernières années, les lois de finances étaient légères. Ce n’est pas le cas cette année.

En matière de fiscalité des particuliers, une refonte importante des modalités d’imposition intervient, qu’il s’agisse de l’impôt sur le revenu, avec la création du prélèvement forfaitaire unique (PFU ou « Flat tax») ou encore de la création de l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) qui remplace l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF).

En matière de fiscalité des entreprises, on constate une diminution progressive du taux de l’impôt sur les sociétés dès 2018 pour les 500 000 premiers euros de résultat avec un taux à 28%, pour aboutir en 2022 à 25% à la place du taux actuel de 33,1/3%.

 

Concernant l’IFI, quelles sont les différences avec l’ISF ? 

Maître COTILLON : La différence majeure est l’assiette de la taxe, puisqu’en matière d’ISF, on avait (en écartant les exonérations prévues) une imposition de l’ensemble du patrimoine du contribuable. Désormais, ne seront plus concernés que les seuls biens immobiliers détenus directement ou indirectement par le contribuable (et non utilisés pour les besoins de son activité professionnelle).

Il n’y aura donc pas de difficulté concernant la détention directe en matière d’IFI.

A l’inverse, la détention indirecte posera des difficultés au contribuable pour la détermination de son assiette, puisqu’il faudra aller à la pêche aux informations auprès des sociétés dont il détient plus de 10% du capital (et de leurs filiales). Il devra les questionner pour déterminer et déclarer la fraction de la valeur de sa participation représentative d’immobilier non affecté à sa propre exploitation (immobilier de rapport, donc).

 

Ce nouveau régime est-il plus avantageux?

Maître COTILLON : Il est compliqué d’avoir une réponse tranchée.

Force est de constater que beaucoup de contribuables qui auraient payé l’ISF, ne supporteront pas l’IFI, puisque par définition, le patrimoine taxable a été réduit. Ce régime est donc avantageux sous l’angle de l’impôt à payer.

Cependant, on va vers une complexification pour le contribuable et le praticien dans la détermination du patrimoine taxable au travers des titres de sociétés.

 

L’objectif du gouvernement au travers de ce nouvel impôt est de relancer la croissance, notamment en supprimant les valeurs mobilières de l’assiette de cet impôt, qu’en pensez-vous ?

Maître COTILLON : Sur le principe, je pense que ça va dans le bon sens. Les contribuables ne seront plus taxés sur les valeurs mobilières qu’ils détiennent, pour autant que ces valeurs ne soient pas taxables à hauteur de la fraction représentative de biens immobiliers.

Pour autant, ce n’est pas un impôt incitatif pour l’investissement dans les entreprises. Le contribuable n’étant pas taxé sur les placements bancaires, il n’aura pas d’intérêt, sous l’angle fiscal, à réinvestir cet argent dans des titres (du moins sous l’angle de l’IFI, avec la suppression de la réduction ISF-PME, la réduction IR-PME étant maintenue).

 

Concernant le PFU (ou flat tax), comment est-il réparti ?

Maître COTILLON : La Flat tax à 30% comprend deux choses : de l’IR à un taux de 12,8% et des prélèvements sociaux au taux de 17,2%.

 

A qui profitera cette unification ?

Maître COTILLON : De prime abord, elle profitera aux contribuables qui étaient dans les tranches les plus fortes du barème de l’impôt. Mais cette tendance n’est pas une vérité absolue et l’approche doit être effectuée revenus par revenus.

En matière de dividendes, la flat tax sera plus intéressante que le barème progressif dès lors que le taux moyen d’imposition sera supérieur à 21,33%.

En matière d’intérêts, à défaut d’abattement de 40%, la flat tax sera intéressante dès lors qu’on sera taxable (tranche à 14%).

Pour les plus-values, tout est affaire d’abattement pour durée de détention applicable en cas d’option pour le barème progressif.

En présence de trois régimes différents, cela nécessite donc de faire des simulations pour voir s’il y a un bénéfice réel pour opter pour le barème progressif ou utiliser la flat tax.

 

 

Propos recueillis par Alice LE MOING.

 

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