fiscalite

  • La détermination de la prépondérance des revenus issus de l’activité de location de meublés permettant l’exonération à l’ISF

    Cass.com., 20 décembre 2023, n°22-17.612, publié au bulletin

     

    Dans un arrêt de rejet en date du 20 décembre 2023, la chambre commerciale de la Cour de cassation affirme que la condition de prépondérance des revenus tirés d’une activité locative de meublés s’apprécie en fonction des BIC[1] nets annuels dégagés et non des recettes brutes tirées de l’activité.

     

    En l’espèce, l’administration fiscale notifie à un couple le 8 mars 2019, une proposition de rectification au titre de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) pour les années 2015, 2016 et 2017, portant réintégration dans l’assiette imposable des immeubles d’habitation qu’ils louaient meublés. La raison avancée par l’administration étant que ces immeubles ne constituent pas des biens professionnels exonérés au sens de l’article 885 R ancien du Code général des impôts, car l’activité locative durant ces années a généré un bénéfice imposable nul ou déficitaire. Par conséquent, ces revenus ne peuvent pas représenter plus de 50% des revenus professionnels de leur foyer fiscal.

    Les contribuables estiment que la condition de prépondérance des revenus tirés de l’activité de location de meublés par rapport aux autres revenus du foyer fiscal doit s’apprécier en fonction des recettes brutes tirées de l’activité de location meublée professionnelle, et non du bénéfice net dégagé par cette activité. Après le rejet de leur réclamation contentieuse, ils assignent l’administration fiscale en annulation de la décision et en décharge des rappels d’imposition mis en recouvrement.

    Le 12 avril 2022, la Cour d’appel de Besançon rejette les demandes car il résulte de l’article 885 R du CGI, que l’ensemble des recettes tirées de la location des meublés du couple doivent être prises en compte pour apprécier le seuil légal de 23 000€. Mais selon les juges, la notion de revenus doit être distinguée de celle des recettes. En effet, les revenus correspondent aux sommes effectivement perçues par les contribuables, ce qui ne peut s’interpréter comme des revenus équivalents au chiffre d’affaires des locations de meublés.

    Les contribuables forment un pourvoi en cassation. Au terme de la troisième et unique branche retenue par la Cour de cassation, ils estiment que selon l’article 885 R du CGI, l’activité locative de meublés est exercée à titre professionnelle et ne rentre pas dans l’assiette de l’ISF. En réalisant plus de 23 000€ de recettes annuelles et retirant de cette activité plus de 50% des revenus professionnels à raison desquels le foyer fiscal est soumis à l’impôt sur le revenu, il convient alors de retenir les recettes brutes et non le résultat net dégagé par cette activité après déduction des charges.

    Le problème posé par cette affaire est de savoir comment s’apprécie le caractère prépondérant du revenu qui permet l’exonération à l’ISF. Autrement dit, l’assiette imposable des revenus tirés de l’activité de location de meublés se calcule-t-elle sur les recettes brutes ou sur les bénéfices nets dégagés annuellement ?

     

    La Cour de cassation se fonde également sur l’article 885 R ancien du CGI et confirme la décision de la cour d’appel. La condition de prépondérance des revenus tirés de l’activité de locations de meublés est caractérisée non pas par les recettes tirées de cette activité professionnelle, mais bien par le bénéfice industriel et commercial net annuel dégagé. Cela permet la comparaison avec l’ensemble des revenus professionnels du foyer fiscal, y compris les bénéfices de la location.

     

    C’est une solution pragmatique qui est rendue car elle permet de comparer les revenus tirés de la location de meublés et des autres revenus d’un même foyer fiscal. Les recettes s’entendent comme le montant directement perçu au titre de l’activité, sans connaitre la déduction de charges et d’abattements. Admettre ainsi les recettes reviendrait économiquement et mécaniquement, à favoriser les modes d’exonérations.

     

    Cette interprétation des juges figure également au Bofip[2] au sujet de l’IFI[3], et l’article régissant[4] cet impôt récent a repris les formulations de l’article 885 R. La solution ne manque toutefois pas de poser des questions en raison de la comparaison et l’utilisation contestable des termes « revenus » et « recettes » au sein des articles du Code et entre les notions d’IFI et d’impôt sur le revenu des personnes physiques[5].

    Quentin SCOLAN

     

    [1] Bénéfices industriels et commerciaux.

    [2] BOI-PAT-IFI-30-10-10-10 §60.

    [3] L’impôt sur la fortune (ISF) a été replacé par l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) depuis la loi n°2017-1837 du 30 décembre 2017.

    [4] CGI, Art. 975.

    [5] Florian LAUSSUCQ, « Appréciation des revenus tirés des locaux d’habitation loués meublés comme des biens professionnels au titre de l’exonération à l’IFI », Dalloz Actualité, fiscalité immobilière, 2 février 2024 (en ligne).

     

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  • Le barème de l’article 669 I du CGI s’applique à la cession de droits démembrés entre personnes morales

    Article publié le 11 décembre 2018

     

    Le recours au démembrement de propriété pour transmettre un bien, notamment dans le cadre d’une société civile immobilière (SCI), est une pratique courante, simple et efficace, permettant de minorer l’imposition de la cession par l’application d’un barème prévu à l’article 669 I du Code général des impôts (CGI).

    Mais ce barème s’applique-t-il lorsque la cession d’un droit démembré se fait entre deux personnes morales ? C’est à cette question que la chambre commerciale de la Cour de cassation a apporté une réponse positive dans un arrêt du 26 septembre 2018.

    En l’espèce, la SCI A. a acquis auprès de la SCI B., dirigée par M.X., l’usufruit d’un ensemble immobilier devant s’éteindre au décès du survivant des époux X. Par la suite, le conservateur des hypothèques a refusé l’enregistrement de l’acte de cession, au motif que les droits de mutation devaient être évalués en considération du prix de cession et non sur la base d’un pourcentage de l’immeuble cédé en pleine propriété comme il est prévu à l’article 669 I du CGI.

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  • Rappel sur le régime fiscal du bitcoin et l’anonymat des transactions

    Article publié le 16 mai 2018

     

    Le bitcoin n’est encadré par aucune autorité centrale capable de créer de la monnaie ou de réguler les transactions. C’est l’offre et la demande qui endossent ce rôle. Cette monnaie présente de nombreux avantages notamment l’anonymat des transactions effectuées. Cependant, il est important de préciser que les détenteurs de bitcoins sont soumis aux impôts et aux contrôles de l’administration fiscale.

    Il convient d’apporter quelques précisions sur le régime fiscal auquel est soumis cette cryptomonnaie. Le fisc considère ainsi que les cryptomonnaies sont des « unités de compte virtuelles stockées sur un support électronique, qui peuvent être valorisées et utilisées comme outil spéculatif ».

    Dès lors, lorsque les gains réalisés sont de nature occasionnelle, ils seront soumis à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices non commerciaux (BNC). Ces gains seront additionnés aux autres revenus du contribuable et seront soumis au barème progressif de l’impôt. Ils feront également l’objet de prélèvements sociaux.

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