Interview des professionnels

  • Interview : Le rôle du notaire dans la lutte contre le blanchiment d’argent

    Interview de Maître Romain CIVEL, Notaire associé de la SCP MAUD LE BRAS-VERRECCHIA, ROMAIN CIVEL ET ELVINA LEMAIRE, NOTAIRES ASSOCIÉS à Brunoy (91)

    Pour rappel le blanchiment d’argent est défini à l’article 324-1 du code pénal comme le fait de « faciliter, par tout moyen, la justification mensongère de l'origine des biens ou des revenus de l'auteur d'un crime ou d'un délit ayant procuré à celui-ci un profit direct ou indirect » ou encore « le fait d'apporter un concours à une opération de placement, de dissimulation ou de conversion du produit direct ou indirect d'un crime ou d'un délit ». Cette infraction donne lieu à une peine de cinq ans d’emprisonnement et 375 000 euros d’amende. La notion de blanchiment d’argent est souvent reliée au financement du terrorisme malgré la présence d’une qualification indépendante à l’article 421-1-2 du code civil. Cet article dispose qu’est un acte terroriste le fait de « financer une entreprise terroriste en fournissant ».

    La problématique du blanchiment d’argent est devenue très importante dans notre société puisque d’après l’Office des Nations Unies contre les drogues et le crime elle représente entre 2 et 5% du PIB mondiale. Pour lutter contre ce mal la France a mis en place un dispositif de lutte contre le blanchiment. En première ligne de ce plan les professionnels du droit et notamment les notaires qui ont un devoir de vigilance et de signalement. En 2020, le service de renseignement chargé de la lutte contre le blanchiment d'argent (TRACFIN) a reçu pas moins de 115 601 informations de la part de professionnelle. Les notaires ont transmis 1 546 déclarations de soupçon à cette agence.

    1. Comme beaucoup de professionnels du droit les notaires sont soumis au Dispositif de lutte contre le Blanchiment de Capitaux et le Financement du Terrorisme (LCB-FT), pouvez-vous nous en dire plus sur ce dispositif ?

    Les obligations en matière de LCB-FT découlent du Groupe d'action financière (GAFI) qui est une organisation mondiale de surveillance du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme.

    Cette organisation intergouvernementale fixe des normes internationales visant à prévenir les activités illégales et les dommages qu'elles causent à la société. C’est cette organisation qui élabore des politiques en la matière.

    Comme 200 pays et juridictions, la France s’est engagée à mettre en œuvre les normes du GAFI dans le cadre d'une réponse mondiale visant à prévenir le crime organisé, la corruption et le terrorisme.

    Pour la France, le COLB (Le Conseil d'orientation de la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme) est chargé de réaliser l’analyse nationale des risques en matière de lutte anti-blanchiment et financement du terrorisme requise par les recommandations du GAFI et l’article 7 de la 4ème directive anti-blanchiment

    Le dernier rapport du GAFI de mai 2022 a témoigné d'une évaluation globalement positive du notariat en tant qu'entité efficace de prévention.

    Toutefois, le Conseil supérieur du Notariat a lancé un grand plan d’action sur les années 2023-2025 auprès des notaires de France pour les former et les accompagner dans la mise en place de procédure de vigilance et de détection des risques.

     

    1. Concrètement comment ce dispositif se met en place lors d’un acte notarié ? Quelles opérations sont concernées par celui-ci ? Quels indices peuvent éveiller les soupçons du notaire ? Quels sont les différents grades de vigilance que doit avoir le notaire face à ces indices ?

    Toutes les opérations sont susceptibles d’alerter la vigilance du notaire, particulièrement les ventes immobilières, dans le neuf ou l’ancien, quel que soit le montant de la transaction. Les montages de sociétés ou cession de fonds de commerce sont également concernés.

    L’article D.561-32-1 du Code monétaire et Financier précise les critères qui doivent conduire le professionnel à une déclaration auprès de l’administration compétente (TRACFIN).

    A titre d’exemple, citons la réalisation d'opérations financières incohérentes au regard des activités habituelles de l'entreprise ou d'opérations suspectes dans des secteurs sensibles aux fraudes à la TVA ou bien Le refus du client de produire des pièces justificatives quant à la provenance des fonds reçus ou quant aux motifs avancés des paiements, ou l'impossibilité de produire ces pièces.

    Le notaire doit s’appuyer sur ces éléments mais pas uniquement. Il doit faire appel à son expérience, presque à son « instinct » pour déterminer les dossiers sensibles.

     

    1. Comment le notaire est-il formé à cette thématique ? Comment est-il accompagné dans le cadre de ses obligations ?

    Les notaires sont formés depuis de nombreuses années sur cette matière, par différents professionnels (avocat, magistrat, TRACFIN). La mise en place du plan d’action 2023-2025 accélère la dynamique de cette formation et va accompagner les notaires dans la mise en place des procédures de vigilance et sur leurs évolutions permanentes.

     

    1. Quelle est la responsabilité du notaire en cas de manquement à son obligation de vigilance et de déclaration ?

    Le notaire, comme tous les professionnels concernés, engage sa responsabilité pénale comme rappelé aux termes des dispositions de l’article 324-1 du code pénal ci-dessus et bien entendu sa responsabilité civile et des sanctions disciplinaires lourdes.

    Propos recueillis par Hugo SOUESME

  • Interview d'une avocate pénaliste sur l'infraction d'homicide routier

    Proposition de loi n°1751 créant l’homicide routier et visant à lutter contre la violence routière

    Le 31 janvier 2024, l’Assemblée nationale a voté en première lecture une proposition de loi1 visant à introduire un nouveau délit spécifique pour les accidents de la circulation résultant d’une prise de risque délibéré, nommé « homicide routier ». Cette initiative fait suite à plusieurs accidents récents où des individus ont perdu la vie, impliquant des conducteurs sous l'influence de substances comme l'alcool ou les stupéfiants.

    Traditionnellement qualifiés d’homicides involontaires, ces délits routiers commis avec une circonstance aggravante sont passibles d'une peine pouvant aller jusqu'à sept ans d'emprisonnement et 100 000 euros d’ amende, cette peine pouvant être portée à dix ans d'emprisonnement et 150 000 euros d'amende en cas de constatation d'au moins deux autres circonstances aggravantes2.

    Toutefois, les proches des victimes ressentent une injustice à qualifier ces actes d'homicides involontaires, alors que les conducteurs ont consciemment pris des substances ayant contribué à l'accident. C'est pourquoi le gouvernement, soutenu par les parlementaires, souhaite instaurer un délit distinct; d' « homicide routier », dissocié des infractions involontaires.

    Maître Boedec, avocate spécialisée en droit pénal et membre du barreau de Vannes, offre son expertise pour nous aider à saisir le sens et la portée de cette loi.

    Dans quel cas le délit d’homicide routier sera t-il reconnu ?

    L’homicide routier vise à créer une infraction autonome lorsque une ou plusieurs circonstances aggravantes s’ajoute à la qualification d’ homicide involontaire résultant d’un accident de la route.

    En d’autres termes, ce nouveau délit, renvoi à un l’homicide causé par le conducteur d’un véhicule terrestre à moteur ayant commis une faute grave. Par ailleurs, Le texte élargit le champ des circonstances aggravantes, qui incluait auparavant la conduite sous l’influence de l’alcool, de stupéfiants, la conduite sans permis, et les excès de vitesse de plus de 50 kilomètres/heure (cette limite étant réduite à 30 km/h).

    Il ajoute désormais l’utilisation du téléphone portable au volant, le défaut de porter assistance à une personne en danger, et la conduite sous l’influence de substances psychoactives légales (telles que les médicaments en doses excessives ou le protoxyde d’azote, par exemple).

    Quelles sont les conséquences pour les auteurs impliqués dans un accident de la route ?

    D’une part, il est important de souligner que l’infraction demeure non intentionnelle. Cela signifie que même si le conducteur impliqué dans un accident de la route a volontairement consommé de l’alcool ou des stupéfiants, cela ne permet pas de conclure de manière concluante qu'il a volontairement cherché à causer la mort de la personne qui perd la vie dans l'accident.

    D’autre part, les peines mentionnées précédemment restent inchangées. En d'autres termes, le délit d’homicide routier est puni de la même manière que l’homicide involontaire avec circonstances aggravantes.

    Quelles sont les conséquences pour les victimes et les proches des victimes impliquées dans un accident de la route ?

    La création de ce nouveau délit d'homicide routier n’a pas d'impact direct sur l'indemnisation des victimes ou de leurs proches. En réalité, cette initiative semble davantage motivée par des considérations symboliques que par des changements concrets dans le système juridique. En renommant l'homicide involontaire en homicide routier, l'objectif principal est de reconnaître symboliquement la souffrance des victimes et de leurs proches, ainsi que la gravité particulière des accidents de la route causés par une prise de risque délibérée.

    Finalement, qu’est ce que la création de l’homicide routier va changer ?

    Selon Maître Boedec il s’agit d’avantage d’une loi « destinée à un meilleur accompagnement des victimes. » En effet, il faut garder à l’esprit que sur le fond, cette nouvelle infraction ne change pas grand-chose dans la mesure où la peine encourue de 10 années d’emprisonnement maximum en fonction des circonstances aggravantes, restera identique.

    En pratique, Il est certain que les familles des victimes sont particulièrement choquées par la qualification d’homicide ou de blessures involontaires, lorsque le conducteur auteur de l’accident a sciemment décidé de prendre le volant de son véhicule en d’état d‘ébriété ou en ayant consommé des stupéfiants. Le terme involontaire pour de tels faits ajoute de la peine à la famille de la personne blessée ou décédée.

    Alors, il est certain que ce changement de qualification va permettre une meilleure compréhension et acceptation des décisions pénales par les victimes et leur famille.

    La transgression de la traditionnelle distinction entre homicide volontaire et involontaire, opérée par la création d’un homicide routier, pourrait-elle avoir des conséquences sur l’ensemble du droit pénal ?

    Les atteintes à la vie peuvent être catégorisées en deux types : volontaires et involontaires. Cette distinction repose sur l'état d'esprit de l'auteur de l'acte, qu'il agisse avec l'intention de causer un dommage ou de manière imprudente.

    Dans le premier cas, l'action est délibérée et dirigée vers un résultat spécifique, tandis que dans le second, elle résulte d'une négligence ou d'une imprudence. Ces deux types d'infractions sont différemment traités sur le plan juridique, même si leur gravité peut être extrême.

    Le non-respect d'une obligation de prudence ou de sécurité relève généralement des infractions non intentionnelles. Cependant, l'introduction de la notion d'homicide routier brouille cette distinction en utilisant une terminologie ambiguë qui ne révèle pas clairement la nature volontaire ou involontaire de l'atteinte à la personne.

    Cela crée une incertitude quant à la responsabilité de l'auteur de l'acte, en ne permettant pas de distinguer clairement s'il s'agit d'un comportement délibéré ou imprudent.

    Propos recueillis par Eva Thébault

     

     

     

    1 Proposition de loi n°1751 créant l’homicide routier et visant à lutter contre la violence routière

    2 Article 221-6-1 du Code pénal

  • Interview d'une juriste en association tutélaire (Association "Eliance," anciennement MSA Tutelles)

    Manon CAILLE est une juriste en association tutélaire depuis une sixaine d'années. Elle a réalisé un Master "Protection des Personnes Vulnérables" à l’Université de Brest.

    Pour le blog JurisactUBS, elle a accepté de nous parler de son métier et de quelques points précis liés aux mesures de protection.

     

    1 - Comment pouvez-vous décrire la profession de juriste en association tutélaire ?

    Chaque association tutélaire a sa façon de fonctionner, mais en tant que juriste chez Eliance (anciennement MSA Tutelles), je m'occupe principalement des successions et des ventes impliquant des majeurs protégés, qu’ils soient propriétaires en indivision ou en pleine propriété. Nous prenons en charge ces dossiers de manière complète, en se substituant ainsi aux mandataires.

    Pour d'autres questions juridiques, nous apportons un soutien à nos collègues mais nous ne prenons pas entièrement en charge les dossiers. 

    Nos responsabilités dans les ventes peuvent varier en fonction de l’état du marché immobilier et des taux d'intérêt en vigueur.

    La collaboration avec les professionnels du droit, notamment les notaires, est donc essentielle pour notre travail.

    2 - Quelles sont les difficultés de ce métier ?

    La gestion des familles autour des majeurs protégés représente la principale difficulté de ce métier. La situation peut donc se compliquer lorsque les coindivisaires refusent de vendre un bien dont le majeur protégé est indivisaire.

    En plus, nous devons composer avec l'évolution des situations précaires des personnes accompagnées, ce qui peut nécessiter des ventes en urgence étant donné, souvent, le peu de patrimoine financier disponible à l’ouverture de la mesure de protection, en dehors du patrimoine immobilier détenu.

    3 – (FOCUS) Quels sont les principaux points de la dernière réforme en ce domaine, la loi du 23 mars 2019 ?

    Faute de temps pour une veille juridique complète, nous nous sommes concentrés sur les points essentiels pour notre travail de juriste au sein d'une association tutélaire. Cette réforme vise à désengorger les tribunaux.

    Par exemple, dans le cadre des successions en tutelle, l'accord du juge n'est plus requis si le notaire atteste que la succession est bénéficiaire. Alors qu’auparavant, nous devions obtenir l'approbation du juge à cet effet. Là, le juge substitue ses pouvoirs au notaire en quelque sorte. 

    Cette réforme simplifie donc notre travail.

    En plus, certains documents ne sont plus nécessaires dans certaines procédures, selon certaines conditions, comme le certificat médical de non-retour à domicile ou la requête en débarras.

    4 - Comment protéger au mieux les majeurs ? Quelles mesures peut-on prendre en amont d’une mesure ?

    Si une personne montre des signes de dégradation, je recommande de l'encourager à écrire ses volontés tant qu'elle est en mesure de le faire de manière saine et éclairée, par exemple sur ses souhaits concernant son décès ou pour la gestion de ses papiers, si un jour ça ne va plus.

    Par exemple, le mandat de protection future est, à ma connaissance, peu utilisé alors que c’est un très bon levier. Les écrits peuvent donc désengorger certaines situations, car les paroles partent mais les écrits restent.

    Dans une situation familiale saine, l'habilitation familiale ou la tutelle familiale sont des options à privilégier pour sécuriser au maximum le patrimoine. 

    Et, le jour où ça se dégrade vraiment, il suffira d’actionner le fameux mandat de protection future ou de requérir une habilitation familiale. En matière juridique c’est ce qui peut sécuriser le plus une personne.

    Il existe justement, s’agissant des tutelles et des curatelles, un service dédié dans le département du Morbihan, à l’UDAF (Union Départementale des Associations Familiales), pour accompagner les futurs ou actuels tuteurs familiaux dans leurs démarches. 

    5 - Quels sont vos liens avec les majeurs et vos liens avec les MJPM (Mandataires Judiciaires à la Protection des Majeurs) ?

    Je n’ai pas beaucoup de liens avec les majeurs, je leur écris en curatelle pour recueillir leur consentement ou je peux aller les voir avec les mandataires lorsque c’est nécessaire. Je peux avoir un lien occasionnel s’ils demandent à me rencontrer ou pour expliquer des situations complexes.

    Parcontre, avec les mandataires, le lien est quotidien, nous avons mutuellement besoin les uns des autres. Par exemple pour recueillir un écrit du majeur, aller lui faire signer un document juridique, l’accompagner aux rendez-vous chez le notaire parce qu’au vu du nombre de mesures qu’on exerce, je ne pourrais pas aller à tous les rendez-vous.

    C’est un métier qu’on ne pourrait pas exercer seul.

    6 - Reste-t-il une autonomie dans la vente d’une maison pour le majeur en curatelle/tutelle?

    Lorsqu'une personne demande la vente de son bien et qu'elle en est pleinement propriétaire, je considère qu’elle garde une certaine autonomie.

    Voici comment nous procédons : je lui demande vers quels professionnels elle souhaite se tourner pour la vente, puis je sollicite des estimations. Ensuite, je consulte le majeur protégé pour déterminer le prix de vente, car il est le signataire du mandat de vente. En curatelle il va signer le mandat, le compromis et la vente. Ainsi, il conserve une certaine maîtrise. Cependant, si sa décision semble aller à l'encontre de ses intérêts, nous l'informons des conséquences ou en référerons au juge. Par exemple, si un bien est estimé à 300 000 € et que le majeur protégé souhaite accepter une offre à 100 000 €, cela ne sera pas possible.

    Il nous ait déjà arrivé, dans le cadre de mesure de tutelle, de faire signer le mandat et l'offre au majeur protégé. Même si juridiquement cela n'a pas de valeur, cela a quand même une signification émotionnelle pour certains.

    J'ai d'ailleurs un exemple récent en tête. Une personne en tutelle nous demandait à chaque fois où en était la vente de son bien. Il y avait eu deux offres au prix, qu’on lui avait présenté, dont une offre qui avait été faite par son voisin. Elle a choisi l'offre de son voisin et nous avons suivi son avis alors qu’elle était en tutelle parce que nous avons estimé qu’elle était encore en capacité de comprendre ce qu’on lui disait et de prendre une décision dans son intérêt, surtout dans la mesure où les deux offres étaient au même prix. Elle a donc choisi en toute connaissance de cause l’acquéreur de sa maison dans laquelle elle avait vécu toute sa vie.

    7- (FOCUS) Comment se passe la création ou l’exploitation d’une entreprise pour un majeur sous tutelle ?

    Le majeur protégé dans une société, est-ce difficile de le représenter ?

    La situation se complique lorsque le majeur sous mesure de protection était déjà dirigeant d'une société avant la mesure et qu’il faut l’en faire sortir.

    Un cas complexe récent impliquait un cadre dirigeant dont nous avons dû faire cesser l’activité avec une revente. Il est très régulier que s’il y a une société avant, lorsqu’on arrive avec la mesure de protection, la société soit déjà en liquidation judiciaire. La collaboration avec des mandataires spécialisés est alors indispensable.

    Bien que le majeur protégé puisse être associé, cela conduit parfois à la dissolution de la société. Notamment dans le cas des Sociétés Civiles Immobilières (SCI). Les deux dernières que j'ai eu à gérer, cela s'est soldé par la vente des biens immobiliers, la SCI n'avait donc plus d'objet donc on l'a dissoute. 

    8 - Que voulez-vous rajouter en guise de conclusion ? Quelles seraient les qualités utiles pour l’exercice de la profession ?

    Il est crucial d'avoir une expérience en tant que mandataire avant d'occuper le poste de juriste, pour comprendre les enjeux des dossiers. Certains juristes peuvent être critiqués pour le fait de répondre aux questions avec des articles du Code civil, sans prendre en compte la complexité des situations impliquant des majeurs protégés, dans la mesure où il y a de la vulnérabilité, des pathologies psychologiques ou de la vieillesse. 

    Il est essentiel de s'adapter, car il faut conseiller une vingtaine de mandataires avec des caractères différents, les majeurs, les familles des majeurs et les autres professionnels. 

    Le travail en équipe est aussi primordial. Les gens peuvent l'oublier lorsqu'ils sont dans leurs conflits familiaux ou dans leur détresse. 

    Dans notre service, la protection de l’intérêt des majeurs protégés est la priorité, même si cela peut ne pas paraître être cela.

    Lorsqu’il faut annoncer à un enfant qui a vécu pendant trente ans dans une maison, qu’elle va être vendue parce que c’est nécessaire, ça peut être difficile à entendre mais derrière on voit aussi que la personne a pu subvenir, grâce à cette vente, à ses besoins à l’EHPAD jusqu’à la fin de sa vie.

    Propos recueillis par Léna RABILLARD

  • le Guichet électronique des formalités d’entreprises (dit Guichet Unique) hébergé et géré par l’INPI

    La loi PACTE du 22 mai 2019 a instauré le Guichet Unique afin de simplifier et regrouper les formalités à effectuer électroniquement tout au long de la vie d’une société (création, dépôt des comptes annuels, de brevets, modifications sociales, cessation d’activité…).  Depuis le 1er janvier 2023, son emploi est obligatoire pour tous les professionnels.

    Après plus d’un an de mise en service, il est temps de faire le point sur son utilisation pratique avec Monsieur Clément STEPHAN, doctorant en droit privé et chargé d’enseignement vacataire.

     

  • Crédit d'impôt au titre des investissements en faveur de l'industrie verte - « C3IV » (art. 35 de la loi de finances 2024)

    Maître Randuineau, notaire spécialisé dans le droit des sociétés et le droit fiscal, a accepté de partager son analyse sur le crédit d’impôt au titre des investissements dans l’industrie verte. Cette mesure, clé dans le contexte actuel de transition énergétique, suscite un intérêt grandissant parmi les acteurs économiques et les observateurs du monde environnemental.

    1. Quelles sont les motivations principales liées à la création du C3IV ?

    D’après Monsieur Bruno LE MAIRE, Ministre de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, ce dispositif simple à mobiliser renforcera la souveraineté énergétique de la France et stimulera l’innovation dans les technologies vertes. Et ainsi le financement des industries qui contribuent à la transition vers une économie décarbonée qui est l’une des quatre priorités du projet de loi relatif à l’industrie verte présenté en Conseil des ministres le 16 mai 2023.

    1. Quelles sont les conditions d’éligibilité pour les entreprises qui souhaitent bénéficier du C3IV ?

    1. D’une part concernant les types d’entreprises :

    • Ne pas être une entreprise en difficulté au sens de l’article 2 du règlement (UE) n°651/2014

    • S’engager à respecter ses obligations fiscales et sociales et l’obligation de dépôt de ses comptes annuels au titre de chacun des exercices au titre duquel le C3IV sera imputé

    • Exploiter les investissements éligibles au C3IV dans le cadre d’une activité ayant obtenu les autorisations requises par la législation environnementale, et se conformer à cette législation

    • S’engager à exploiter, en France, les investissements éligibles au C3IV pendant 5 ans au moins à compter de la date de leur mise en service (durée réduite à 3 ans pour les PME)

    • S’engager à ne pas transférer, dans les 5 exercices, leur activité hors du territoire national

     

    • Ne pas avoir transféré vers le territoire national, au cours des 2 exercices précédant celui du dépôt de la demande d’agrément, d’activités identiques ou similaires à celles éligibles au C3IV, en provenance d’un Etat membre de l’UE ou d’un Etat partie à l’accord sur l’Espace économique européen.

    1. D’autre part les activités éligibles :

    Sont visées les activités contribuant à la production de batteries, de panneaux solaires, d’éoliennes ou de pompes à chaleur.

    Le texte délimite de façon précise pour chacun de ces domaines, les activités éligibles (II, A de l’article 35 de la LF). Ainsi, par exemple, pour la production d’éoliennes, est visée la fabrication de mats, de pales, de nacelles, de fondations posées et flottantes, de sous-stations électriques. Il en irait de même pour la fabrication de composants essentiels conçus et utilisés principalement comme intrants directs dans la production de ces équipements.

    Un arrêté conjoint des ministres chargés de l’économie et de l’industrie déterminera la liste des équipements, sous-composants et matières premières utilisés dans le cadre de ces activités.

    1. Quels types d’investissements sont éligibles au C3IV ?

    Seront retenues les dépenses (autres que de remplacement) engagées, entrant dans la détermination du résultat imposable, en vue de la production ou de l’acquisition des éléments suivants :

    • Eléments corporels : Bâtiments, installations, équipements, machines et terrains d’assise nécessaires au fonctionnement de ces derniers équipements, à la condition de ne pas avoir été acquis auprès d’une entreprise liée au sens de l’article 39-12 du CGI ;

    • Eléments incorporels : Droits de brevet, licences, savoir-faire ou autres droits de propriété intellectuelle, sous réserve du respect d’un certain nombre de conditions ;

    • Les autorisations d’occupation temporaire du domaine public constitutives d’un droit réel.

    L’assiette du crédit d’impôt est constituée du prix de revient majoré des taxes et frais de toute nature, à l’exception des frais directement engagés pour la mise en état d’utilisation du bien et minoré des aides publiques reçues à raison de ces dépenses.

    1. Quelles sont les principales différences entre le C3IV et les autres dispositifs d’aide à l’investissement ? Comment le cumul entre ce dispositif et les autres aides d’Etat sera contrôlé ?

    Afin de s’assurer de l’éligibilité et de la viabilité économique du projet d’investissement que souhaitent réaliser les entreprises concernées, le bénéfice du crédit d’impôt serait subordonné à l’octroi d’un agrément préalable dans les conditions prévues à l’article 1649 nonies du CGI, pris après avis conforme de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe).

    Il peut être précisé, que s’agissant du cumul du C3IV avec d’autres aides d’Etat reçues au titre des dépenses éligibles, que :

    • Le montant total de l’aide ne peut excéder le taux maximum de soutien prévu par ce texte ;

    • Le montant total de l’aide ne peut excéder 100 % des coûts admissibles.

    1. Le plafond de 150 Me est-il suffisant pour inciter les grandes entreprises à investir dans l’industrie verte ?

    Le taux du C3IV devra être mentionné dans l’agrément préalable. Le taux de droit commun est certes de 20 %, mais il pourra être porté à :

    • 25 % pour les investissements réalisés dans les zones définies à l’Annexe 1 du décret n°2022-968 du 30 juin 2022, relatif aux zones d’aide à finalité régionale et aux zones d’aide à l’investissement des PME pour la période 2022-2027 (dans sa rédaction en vigueur au 1er septembre 2023) ;

    • 40 % pour les investissements dans les zones définies à l’Annexe 2 du décret susmentionné.

    Ces taux seront de surcroît majorés de :

    • 10 % pour les investissements réalisés par les Moyennes entreprises au sens de la règlementation européenne (moins de 250 salariés, CA annuel n’excédant pas 50 m€ ou total du bilan annuel n’excédant pas 43 m€) ;

    • 20 % pour les investissements réalisés par les Petites entreprises au sens de la réglementation européenne (moins de 50 salariés, CA annuel ou total du bilan annuel n’excédant pas 10 m€).

    Le montant total du C3IV est plafonné à 150 m€ par entreprise (200 m€ pour les investissements réalisés dans les zones définies à l’Annexe 1 du décret n°2022-968 du 30 juin 2022, relatif aux zones d’aide à finalité régionale et aux zones d’aide à l’investissement des PME pour la période 2022-2027 et 350 m€ pour les investissements réalisés dans les zones définies à l’Annexe 2 du décret susmentionné). Ce plafond s’appréciera en totalisant l’ensemble des aides d’Etat obtenues par des entreprises qui ne sont pas considérées comme autonomes.

    1. Quelles sont les modalités d’imputation du C3IV sur l’impôt sur le revenu ou sur les sociétés ?

    Le crédit d’impôt s’appliquera par fraction au rythme de l’engagement des investissements éligibles en appliquant à ces dépenses le taux de crédit d’impôt mentionné dans la décision d’agrément.

    Le montant du C3IV sera imputé sur l’IR/IS dû par le contribuable au titre de l’année/l’exercice au cours duquel ces dépenses sont exposées.

    Si le montant de la fraction du crédit d’impôt excède l’impôt dû au titre de l’année ou de l’exercice, l’excédent sera restitué. Aucun délai n’est spécifié par le texte à ce stade.

    Propos recueillis par Dorian GABORY

  • Regard sur la réforme de la procédure civile

    Article publié le 2 mars 2020

     

    Le 11 décembre dernier, le décret tant attendu réformant la procédure civile[1] est paru. Cette réforme d’ampleur a été vivement critiquée par les professionnels du droit d’une part pour les nombreux changements jugés non opportuns, d’autre part, pour sa parution très tardive au regard de la date d’entrée en vigueur fixée au 1erjanvier 2020. 

    Mélody Le Carrer, Clerc d'Huissier de Justice, a accepté de répondre à nos questions sur certaines modifications majeures du Code de procédure civile. Mme Le Carrer est actuellement huissier stagiaire en formation à l'Institut National de Formation des Huissiers de Justice depuis 2 ans. Auparavant elle y travaillait à mi-temps en parallèle de ses études universitaires à la faculté de droit de Vannes. 

     

  • Interview : Focus sur la commande publique

       Article publié le 31 janvier 2023

  • Projet de loi confiance : focus sur la médiation entreprise et administration

    Publié le 16 mai 2018

     

    Les députés ont voté le 30 janvier 2018 en première lecture le projet de loi pour un État au service d’une société de confiance (dit projet de loi « sur le droit à l’erreur »). Nous avons décidé de nous intéresser à la médiation entreprise et administration prévue par ce projet.

    Madame Agnès ROUILLIER, juriste d’entreprise en cabinet d’expertise comptable a accepté de répondre à nos questions.

     

    Pouvez-vous nous rappeler en quelques mots en quoi consiste la médiation entreprise administration prévue dans le projet de loi « confiance » ?

    Agnès ROUILLIER : La médiation est un mode amiable et confidentiel de règlement des conflits. Elle permet aux individus en conflit de faire intervenir un tiers indépendant et impartial entre eux afin de résoudre leurs différends de façon consensuelle sans préjudice des voies de recours existantes. La loi pour un Etat au service d'une société de confiance propose d'expérimenter la médiation entre les entreprises et les administrations ainsi que les établissements publics de l'Etat pour une durée de quatre ans.  Le projet de loi prévoit surtout ce type de recours entre les URSSAF et les cotisants. 

     

  • La mise en place des nouvelles mesures anticorruption

    Article publié le 22 avril 2018

     

    La loi n° 2016-1691 dite « Sapin II » du 9 décembre 2016 impose aux dirigeants de sociétés qualifiées de « grande taille » de mettre en place de nouvelles mesures anticorruption. Ces nouveaux dispositifs touchent tant le domaine public que le domaine privé.

    Un juriste d’entreprise préférant garder l’anonymat a accepté de répondre à nos questions.

     

    Pouvez-vous nous rappeler les nouveautés apportées par la Loi Sapin II ? 

    "Tout d’abord, il convient de rappeler le contexte de la loi Sapin 2. Elle renforce la législation française en matière de lutte contre la corruption et le trafic d’influence, en particulier contre la corruption transnationale, en mettant en place des mesures comparables à certains pays : US (FCPA), Royaume-Uni (UK Bribery Act). La France comble ainsi son retard en la matière. La loi SAPIN 2 prévoit que les sociétés (avec certaines caractéristiques) adoptent 8 mesures obligatoires pour prévenir et détecter la commission d’actes de corruption ou de trafic d’influence en France et à l’étranger. 

  • Focus sur la suppression de la taxe d'habitation

    Article publié le 05 mars 2020

     

    La loi de finances 2019 pour 2020 a été promulguée le 28 décembre 2019 et publiée au Journal officiel, le 29 décembre 2019. Celle-ci prévoit des mesures fiscales importantes notamment la suppression de la taxe d’habitation.

    Considérée comme une mesure attentatoire aux libertés locales par certains, ou comme un avantage significatif pour le pouvoir d’achat par d’autres, cette suppression a fait couler beaucoup d’encre tant dans son principe que sur son opportunité.

    Éric PECHILLON, Professeur en droit public au sein de la Faculté de droit de l’Université de Bretagne-sud, répond à nos questions sur cette réforme fiscale. 

  • Echange avec un Huissier de justice sur leur nouvelle compétence en matière de procédures collectives

    Article publié le 16 février 2017

     

    L’huissier de justice fait depuis peu l’objet de multiples projets de réforme qu’il s’agisse de son statut ou encore de son activité. Ainsi, l’ordonnance du 2 juin 2016[1] prise en application de la loi Macron[2], a élargi l’activité de l’huissier de justice qui est compétent en matière de procédure collective depuis le 1er janvier 2017.

     L’huissier de justice pourra donc exercer les fonctions de mandataire judiciaire mais sous certaines conditions. En effet l’huissier ne pourra être désigné que dans le cadre des procédures de rétablissement professionnel et des procédures de liquidation, ouvertes à l'égard des entreprises qui ne comptent aucun salarié et dont le chiffre annuel hors taxes est inférieur ou égal à 100 000 euros.

    Que pense l’huissier de justice de cette nouvelle compétence ? L’huissier interrogé estime que « toute attribution de nouvelle compétence est salutaire pour notre profession. Il s'agit d'une reconnaissance supplémentaire de notre expertise, de notre qualité d'Officier public et ministériel dans une matière qui  participe au règlement des créances dans le cadre d'une procédure collective et non plus individuelle. »De plus, il considère qu’en raison de la qualité de juriste de proximité de l’huissier de justice, leur «connaissance du terrain et des acteurs économiques dans un territoire donné permet d'appréhender plus facilement les données d'un dossier par souci de rapidité dans les zones où les mandataires judiciaires sont peu nombreux. »

    Toutefois, il nuance cette nouvelle nomination puisqu’il existe un risque de conflit d'intérêt. En effet l’huissier de justice pourra se retrouver en concurrence avec un mandataire judiciaire qui aurait fait appel à ce dernier pour le recouvrement d’une créance dans le cadre d’une procédure de liquidation.

    D’ailleurs, il estime « qu’en qualité d'assistant du Magistrat dans le cadre du rétablissement personnel, il sera difficile moralement  pour un huissier de Justice de participer à l'effacement des dettes, reconnues dans un titre exécutoire, dont l'une des missions régaliennes est de mettre à exécution une décision de justice! Cela paraît antinomique. »

    De plus, force est de constater que les procédures collectives sont une matière très technique, une spécialité qui demande des connaissances pointues. Il serait légitime de se demander comment l’huissier de justice compte-t-il se former. Il faut savoir que l’huissier de justice conserve un devoir de formation. Ainsi, l'Ecole Nationale de Procédure a prévu un module de formation sur six jours et demi pour appréhender l'environnement et  les techniques de la liquidation judiciaire.Cela sera-t-il suffisant ? Puisque comme l'évoque l'huissier questionné, « il n'y a pas de petite liquidation par principe en mesurant les conséquences humaines.» Mais surtout un rétablissement professionnel ou encore une petite liquidation peut très vite se transformer en une véritable liquidation (délais non-respectés, erreur sur l’actif etc.)

    A la question : cette nouvelle attribution constitue-t-elle une aubaine financière pour votre profession ? L’huissier met en avant les dernières données sur le nombre de défaillances d'entreprises en France  qui enregistrent une baisse d'environ  8,3 % en 2016, notamment concernant les petites entreprises. En effet, « le Législateur privilégie surtout la sauvegarde de justice dans un intérêt bien compris de tous. » Il nous rappelle qu’en matière de «liquidation judiciaire, les honoraires sont prélevés sur les fonds disponibles, que le liquidateur détient à la Caisse des Dépôts et Consignation. Il arrive assez fréquemment qu'en cas d'insuffisance de fonds, le liquidateur n'est pas intégralement payé. Nous sommes soumis au même tarif que le mandataire. D’ailleurs, il est prévu en cas d'impécuniosité le versement d'une indemnisation par un fonds spécifique. » Mais l’Huissier de justice ajoute « Nous n'avons pas d'expérience et de recul dans l'immédiat pour porter un jugement sur la rentabilité de cette nouvelle activité. »

    Enfin, force est de constater que ce sont les tribunaux qui feront de cette nomination un véritable changement ou non. En effet, c’est aux juges qu’incombe la désignation soit du mandataire judiciaire soit de l’huissier de Justice. En conclusion, l’huissier de justice rappelle que « certains mandataires judiciaires ne voient passer que des petites liquidations judiciaires dans des zones en souffrance industrielle. Ainsi, il n'est pas évident que les Tribunaux de Commerce penseront en premier aux Huissiers de Justice. »

    Article rédigé avec le  concours d’un huissier de justice souhaitant garder l’anonymat.

    Elodie PADELLEC

     


    [1] Ordonnance n°2016-727 relative à la désignation en justice, à titre habituel, des huissiers de justice et des commissaires-priseurs judiciaires en qualité de liquidateur ou d'assistant du juge commis dans certaines procédures prévues au titre IV du livre VI du code de commerce

     

    [2] Loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques

  • Le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu

    Article publié le 24 février 2017

     

    Ce nouveau mode d’imposition entrera en vigueur le 1er janvier 2018, comme l’a annoncé le ministre des Finances et des Comptes publics et le secrétaire d’Etat chargé du Budget dans une communication au Conseil des ministres le mercredi 3 août 2016 .

    Pour rappel, cette réforme va concerner plus de 98% des foyers et s’appliquera automatiquement. Concernant son fonctionnement, lors de l’année 2017, la déclaration de revenu 2016 donnera lieu à la réception d’un « taux de prélèvement à la source ». Ce taux de prélèvement s’appliquera automatiquement en janvier 2018 et se déduira du salaire normalement perçu. Il convient de noter que ce dernier apparaîtra sur la fiche de paie. Par la suite, une déclaration de revenu 2017 viendra ajuster le taux de prélèvement qui s’appliquera sur l’année suivante. Ce taux pourra bien-sûr changer en cours d’année en cas de changement de situation.Bien que présenté par le gouvernement comme une simplification et une modernisation nécessaire de notre fiscalité, ce changement semble compliqué à comprendre et laisse certaines questions sans réponse, c’est pour cela qu’il est utile de demander conseil à un gestionnaire de Patrimoine.

    • Pour commencer, que pensez-vous de cette réforme ?

    « Elle est indispensable. Le système de perception de l’impôt en France n’est pas vraiment un exemple, il est imparfait et complexe. Avec cette réforme, l’Etat cherche à sécuriser la perception de l’impôt, en s’assurant des revenus réguliers et en diminuant les fraudes. Quand on regarde les autres pays d’Europe, on peut dire que la France rattrape son retard ! Je pense que c’est une réforme qui a du sens, mais qui nécessite des précisions, notamment pour adapter les stratégies patrimoniales que l’on établit avec nos clients. ».

    • Le prélèvement à la source va-t-il modifier le montant de l’impôt ?

    « Non, cette réforme vise uniquement à changer son mode de recouvrement, et non son calcul, c’est d’ailleurs pour cette raison que la déclaration d’impôts reste obligatoire. »

    • Lorsque l’on parle de cette réforme, le terme « année blanche » est souvent évoqué, qu’en est-il en réalité ?

    « Le problème qui va se poser, est qu’il faut éviter de payer deux fois l’IR, celui de 2017 dû en 2018, et dans le même temps les prélèvements à la source sur les revenus de 2018. En réalité, les revenus non exceptionnels de 2017 vont échapper à l’impôt, mais il faudra tout de même déclarer à l’administration fiscale les revenus exceptionnels comme les plus-values mobilières ou immobilières. Ces revenus seront eux imposés en 2018. Mais cette année particulière ne va pas effacer les réductions et crédits d’impôts ! ils vont être maintenus et versés à la fin de l’été 2018 lors du solde de l’impôt. C’est un réel soulagement au niveau des stratégies fiscales que l’on peut mettre en œuvre avec nos clients ».

    • Concernant la confidentialité, le fait d’insérer un tiers, comme l’employeur, dans le mécanisme de l’imposition n’est-il pas dangereux ?

    « Il y a un certain risque en effet, bien que la seule information soit le taux moyen d’imposition et non pas l’ensemble des revenus, il sera facile pour l’employeur de se faire une idée de votre situation. Un taux faible signifierait pour lui des revenus faibles, ou bien une bonne défiscalisation. Mais un taux d’imposition élevé, cela lui indiquerait des revenus élevés. Mais une solution existe, on a laissé le choix aux salariés de choisir un taux neutre, là où l’employeur va donc appliquer un taux calculé sur la base du montant de la rémunération qu’il verse. La différence avec le taux réel, qui correspondrait aux revenus du patrimoine par exemple, sera réglée directement à la DGFIP. Je pense que cette alternative règle le problème de la confidentialité »

    • Les entreprises seront considérées comme des tiers collecteurs, mais en cas d’erreur ou de fraude, qui est responsable ?

    « Si l’employeur n’accomplit pas sa mission, les services fiscaux pourront utiliser les prérogatives classiques à son encontre, et seulement contre l’employeur ! Il n’y aura en aucun cas une solidarité du paiement de l’impôt entre vous et votre employeur »

    Cette réforme va considérablement modifier le mode de prélèvement de l’imposition, mais va nécessiter des ajustements afin d’éviter tout type de fraude. De plus, pour être applicable en 2018, cette dernière doit obtenir l’aval du Conseil Constitutionnel et ne pas être annulée en cas de changement de majorité. Il s’agit ici d’une réelle modernisation de la fiscalité en France, et d’une nouvelle organisation qui n’a pas fini d’évoluer.

    Article réalisé selon l’interview d’un conseiller en gestion de patrimoine souhaitant conserver l’anonymat.

    Gwenn de CHATEAUBOURG

  • INTERVIEW : Précisions sur la loi de finances pour 2018

    Article publié le 5 mars 2018

     

    Chaque année, le Parlement approuve le budget de l’Etat en votant la loi de finances pour l’exercice suivant, afin de déterminer le montant, la nature et l’affectation des ressources et des charges de l’Etat.

    Maître COTILLON, avocat au barreau de Rennes, a accepté de répondre à nos questions concernant la loi de finances pour 2018.

     

    Quelles sont les nouveautés principales cette année ?

    Maître COTILLON : Toutes les lois de finances ne se ressemblent pas. Ces dernières années, les lois de finances étaient légères. Ce n’est pas le cas cette année.

    En matière de fiscalité des particuliers, une refonte importante des modalités d’imposition intervient, qu’il s’agisse de l’impôt sur le revenu, avec la création du prélèvement forfaitaire unique (PFU ou « Flat tax») ou encore de la création de l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) qui remplace l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF).

  • L’impact du nouveau règlement général sur la protection des données

    Article publié le 10 Mars 2018

     

    Le 28 mai 2018, une nouvelle norme s’appliquera et elle concerne la protection des données. En effet, il s’agit du nouveau règlement général sur la protection des données qui a pour objectif principal de faire évoluer l’Europe en s’adaptant aux nouvelles réalités du numérique. Les entreprises vont donc devoir se conformer à cette réforme, mais quel impact ce nouveau règlement va-t-il réellement avoir ?

    Interview de Monsieur Louis LE NORMAND, juriste d’entreprise à Triballat Noyal.

     

    Pouvez-vous nous rappeler ce qu’est le règlement général sur la protection des données (RGPD) ?

    Louis LE NORMAND : C’est un texte unique européen qui a une incidence sur la vie électronique, mais également sur l’utilisation et la perception des données personnelles et privées détenues par tous les acteurs de la société. Ces derniers doivent se conformer à une nécessité de transparence quant à la gestion de ces données.

    Le règlement augmente considérablement la responsabilisation des acteurs. En effet, avant le règlement, il ne s’agissait que d’une déclaration auprès de la CNIL. Désormais la CNIL régulera et contrôlera les entités. 

  • Focus sur l’impact de la réforme du divorce par consentement mutuel auprès des notaires

    Article publié le 2 avril 2018

     

    Cela fait maintenant plus d’un an que la réforme du divorce par consentement mutuel issue de la loi J21 du 18 novembre 2016 est entrée en vigueur (1er janvier 2017). Celle-ci a introduit une nouvelle mission pour les notaires, cependant a-t-elle réellement eu un impact sur le métier de notaire ?

    Maitre Guillaume CHAUCHAT-ROZIER, notaire à VANNES, a répondu à nos questions.

     

    Pouvez-vous rappeler en quelques mots quels ont été les points principaux de cette réforme ?

    Guillaume CHAUCHAT-ROZIER : La réforme a substitué un régime conventionnel au régime judiciaire initialement en place en matière de divorce amiable. Auparavant, tous les divorces nécessitaient de passer devant le juge, ce qui impliquait en général un délai de traitement des dossiers mal maîtrisé, plus ou moins long selon les périodes. Aujourd’hui, pour la plupart des divorces par consentement mutuel, la procédure est purement conventionnelle. Les avocats des époux rédigent une convention de divorce signée par les Parties et confiée au notaire afin qu’elle soit déposée au rang de ses minutes et revête un caractère définitif.

  • Focus sur l’élaboration et les apports des Ordonnances Macron

    Article publié le 15 mars 2019

     

    Cela fait désormais près d’un an et demi que les ordonnances MACRON de septembre 2017 portant réforme du droit du travail et ses décrets d’applications ont été publiés au Journal officiel. Ces ordonnances ne sont pas anodines, elles réforment en profondeur le Code du travail notamment en ce qui concerne les institutions représentatives du personnel mais aussi en matière de négociation collective ou encore en matière de rupture du contrat de travail. Nous nous sommes intéressés à la manière dont ces ordonnances ont été élaborées, dans quel contexte et aux avantages associés pour les entreprises. 

    Monsieur Hervé LANOUZIÈRE, actuellement inspecteur à l’IGAS (Inspection Générale des affaires sociales) a accepté de répondre à nos questions.

    Rentré à l’inspection du travail en 1988, il a travaillé dans différents services déconcentrés de l’État (notamment en tant que directeur du travail adjoint à la direction départementale du Rhône) avant de rejoindre l’administration centrale (Direction Générale du Travail) en 2005 où il est chargé de la recodification du Code du travail de 2005 à 2008. Il est ensuite devenu responsable du suivi de l’ensemble de la politique santé au travail en France (chargé du dossier de la « crise sociale » France Télécom puis du plan d’urgence gouvernemental sur les risques psycho-sociaux). Après un détour par le privé au sein du groupe métallurgique et minier ERAMET, il est nommé directeur de l’ANACT[1] en décembre 2012. Il quitte l’ANACT en 2017 pour l’IGAS où il a une mission d’appui à l’élaboration des ordonnances Macron.

  • Interview : Les conséquences du projet de loi PACTE sur le commissariat aux comptes et les entreprises

    Publié le 25 mars 2019

     

    Débattu en ce moment au Parlement, le plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises (PACTE), projette d’alléger les obligations comptables incombant aux entreprises, notamment en réformant le commissariat aux comptes. Mais quelles seront les conséquences concrètes pour les entreprises ?

    Dans la continuité de notre dossier spécial consacré au projet de loi PACTE, un expert-comptable et commissaire aux comptes ayant souhaité garder l’anonymat a accepté de répondre à nos questions.

     

    Pouvez-vous nous rappeler en quelques mots l’impact du projet de loi PACTE sur le commissariat aux comptes ?

    « La profession de commissaire aux comptes (CAC) est fortement affectée par cette réforme. La principale mesure, étant le rehaussement des seuils d'audit obligatoire des comptes des sociétés. L'audit deviendrait ainsi obligatoire pour les sociétés commerciales, dès lors qu'elles dépassent deux des trois seuils suivants : 8 millions d'euros de chiffre d'affaires, 4 millions d'euros de bilan et 50 salariés.

    Un tel rehaussement des seuils aurait un effet non négligeable pour la profession de CAC. Cette réforme pourrait en effet priver les commissaires aux comptes d’environ 150 000 mandats, ce qui est beaucoup sur un total de 220 000 mandats. En termes de chiffre d'affaires, la perte pourrait s’élever entre 800 et 900 millions d'euros sur un total de 2,7 milliards. »

     

  • Focus sur le droit de l’environnement

    Article publié le 13 février 2020

     

    A une heure où l’urgence climatique occupe une grande place dans le débat public, le saisissement des enjeux environnementaux par le droit est une vraie question. Maître Thomas Dubreuil, avocat du barreau de Vannes spécialisé en droit de l’environnement, a accepté de répondre à nos questions.