L'introduction d'un droit à la déconnexion dans le Code du travail à partir du 1er janvier 2017

Article publié le 02 janvier 2017

 

Dans une ère où les salariés sont « connectés » en dehors des heures de travail, le droit à la déconnexion vise à garantir la santé du salarié. Cette mesure a en effet pour but de réduire le stress au travail. Ce droit implique pour le salarié la faculté d'ignorer tout mail professionnel par exemple, qui lui serait remis après ses heures de travail.

 

Depuis le 1er janvier, le Code du travail a intégré la notion de droit à la déconnexion au sein de l'article L2242-8 7°. Cela signifie que les entreprises de plus de 50 salariés doivent négocier avec les partenaires sociaux les modalités d'exercice de ce droit, afin de mieux réguler l'intrusion du numérique à des fins professionnelles dans la vie personnelle et familiale du salarié. La question du droit à la déconnexion figure désormais à l'ordre du jour de la négociation collective annuelle relative à la qualité de vie au travail. Un accord doit pouvoir alors être négocié. Ce n'est seulement qu'à défaut d'accord que l'entreprise de plus de 300 salariés pourra élaborer une charte, après avis du comité d'entreprise, ou, le cas échéant, des délégués du personnel ; l'élaboration de cette charte ne pouvant s'exempter de négociation collective préalable. Pour les autres entreprises, l'employeur doit définir ces modalités et les communiquer à ses salariés par tout moyens. Ce droit à la déconnexion vise à redéfinir la frêle limite entre vie professionnelle et personnelle du salarié.

 

Concrètement, il s'agit pour l'entreprise de réguler l'utilisation des outils numériques, devenus incontournables dans le monde du travail d'aujourd'hui. L'entreprise, mettant à disposition du salarié des ordinateurs, des téléphones mobiles, ou tout autre appareil connecté doit prévoir les modalités d'utilisation de ces appareils. En effet, l'entreprise doit veiller au respect du droit au repos du salarié, obligation dérivant de la préservation de la santé et de la sécurité des salariés par l'entreprise. Dans un arrêt du 11 juin 2006, la chambre sociale de la Cour de cassation a rappelé que cette obligation de sécurité de résultat incombait à l'entreprise et non au salarié. Ainsi, l'entreprise ne peut se décharger de cette obligation en laissant au salarié le soin d'auto-gérer l'utilisation d'appareils connectés.

 

Or, avec les nouvelles dispositions du Code du travail, l'obligation de sécurité de l'entreprise n'est plus une obligation de résultat mais de moyen renforcé. Cette requalification de l'obligation peut-elle être regardée comme la porte ouverte à un affaiblissement des mesures prises par l'entreprise en matière de sécurité au travail ? Malgré cette requalification, l'entreprise doit prouver qu'elle a pris toutes les mesures nécessaires pour gérer le risque. Une potentielle dérive de cette obligation s'en trouve alors limitée.

 

Du point de vue des risques encourus par l'entreprise, le manquement au respect du droit à la déconnexion est interprété comme une violation de la bonne foi contractuelle de l'employeur. Si la déconnexion du salarié n'est pas appliquée, l'employeur encourt des sanctions au titre d'une exécution déloyale du contrat de travail. Toutefois, l'entreprise n'est pas à l'abri de salariés récalcitrants malgré les moyens mis en œuvre pour assurer la déconnexion. Des sanctions disciplinaires pourront alors être prises par l'employeur contre le salarié refusant de s'y soumettre. Il apparaît alors plutôt contradictoire de sanctionner un salarié souhaitant être productif.

 

En conclusion, ce droit à la déconnexion peut être considéré au premier abord comme une bonne chose pour la réduction du stress au travail. Néanmoins, est-il applicable dans toutes les entreprises ? Qu'en est-il des professions où des urgences peuvent survenir hors des horaires de travail ? Ou bien des renseignements fournis d'un collègue à un autre qui se trouve en congé par exemple ? Il semble un peu exagéré de sanctionner le salarié dans de telles hypothèses. Il semble alors que la frontière entre vie personnelle et professionnelle ne puisse être complètement imperméable.

Lucie TALET

 

Sources :

 
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