La résolution du contrat n’empêche pas l’application d’une clause limitative de responsabilité

Article publié le 14 avril 2018

 

La chambre commerciale de la Cour de cassation, par un arrêt du 7 février 2018, est venue opérer un revirement de jurisprudence concernant la résolution des contrats et la possible application des clauses y figurant.

Les faits remontent au 12 octobre 2010. La société CNIM a procédé à des réparations sur une chaudière d’une centrale exploitée par une société exerçant dans le domaine de l’énergie, la société SCT. A la suite de ces réparations, de nouvelles fuites sont survenues. Une expertise judiciaire a alors été diligentée et a conclu que ces fuites étaient imputables aux soudures effectuées par la société CNIM.

En conséquence, la société Valmy énergies, venant aux droits de l’exploitant de la centrale (la société SCT), décide d’assigner la société CNIM en résolution du contrat ainsi qu’en paiement de dommages-intérêts en réparation des préjudices matériels et financiers subis. Pour se défendre, la société CNIM oppose la clause limitative de responsabilité stipulée dans le contrat.

La cour d’appel de Nancy a rendu un arrêt le 20 avril 2016 en faveur de la société Valmy énergies et a de ce fait accédé à sa demande de résolution du contrat. Elle a également condamné la société CNIM au paiement de dommages-intérêts en écartant la clause limitative de réparation. Les juges du fond estiment par principe que « la résolution de la vente emportant anéantissement rétroactif du contrat et remise des choses en leur état antérieur, il n’y a pas lieu d’appliquer la clause limitative de responsabilité ».

Cependant, la chambre commerciale dans son arrêt du 7 février 2018 vient casser la décision de la cour d’appel. Les juges du droit ne remettent pas en cause la décision de résolution du contrat mais viennent préciser qu’en « cas de résolution d’un contrat pour inexécution, les clauses limitatives de réparation des conséquences de cette inexécution demeurent applicables. » En d’autres termes, la chambre commerciale considère que la clause limitative de responsabilité reste applicable malgré la résolution du contrat.

Cette décision semble de prime abord étonnante, puisque, la jurisprudence reconnaît que la résolution du contrat entraîne inévitablement l’anéantissement rétroactif du contrat. Ainsi, la conséquence directe est que les clauses du contrat se retrouvent également anéanties et, comme le contrat, sont réputées n’avoir jamais existées.

La position de la Cour de cassation est donc en contradiction avec la jurisprudence antérieure. Auparavant, il était considéré que, le contrat formant un tout indivisible, ces clauses avaient donc vocation à disparaître en cas de résolution. C’est ce qu’avait en effet affirmé la chambre commerciale dans un arrêt du 5 octobre 2010[1], « la résolution de la vente emportant anéantissement rétroactif du contrat et remise des choses en leur état antérieur, la cour d'appel en a exactement déduit qu'il n'y avait pas lieu d'appliquer les clauses limitatives de responsabilité. » Ainsi, la jurisprudence interdisait l’application des clauses du contrat dans le cas où ce dernier serait résolu.

La jurisprudence étant clairement définie sur ce sujet, on peut se poser la question des raisons d’un tel revirement. En effet, il semble difficile d’exécuter un contrat pourtant résolu. Ainsi, quelle justification les juges apportent-ils sur cette décision ?

La réponse réside dans le nouvel article 1230 du Code civil qui dispose que « La résolution n'affecte ni les clauses relatives au règlement des différends, ni celles destinées à produire effet même en cas de résolution, telles les clauses de confidentialité et de non-concurrence. »

La Cour de cassation tient à appliquer cette nouvelle disposition de la réforme du droit des obligations qui permet à une clause relative au règlement des différends de survivre en cas de résolution. En l’espèce, la clause limitative de responsabilité a cette fonction de « règlement des différends », c’est pourquoi la Cour de cassation estime que la clause a vocation à survivre à la résolution du contrat et à s’appliquer au vu du nouveau régime prévu par le Code civil.

 

Charline LE CHEVILLER

 

Sources :

-          Cass. Com. 7 février 2018, n°16-20.352

-          BAMDE A., La résolution du contrat ne fait pas obstacle à l’application d’une clause limitative de responsabilité, disponible : https://aurelienbamde.com/2018/02/08/la-resolution-du-contrat-ne-fait-pas-obstacle-a-lapplication-dune-clause-limitative-de-responsabilite-cass-com-7-fevr-2018/, 8 février 2018.

 


[1] Com. 5 octobre 2010, n°08-11.630

responsabilité Contrat clause résolutoire résolution clause limitative de responsabilité

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